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Vendredi 7 Décembre 2012 :

HOMMAGE. Oscar Niemeyer s'est éteint mercredi soir. Le Havre lui doit son emblématique « pot de yaourt », surnom témoignant des réserves que sa construction suscita à l'époque.

Oscar Niemeyer n'aimait pas les angles droits. Un comble, au Havre. La Porte Océane doit pourtant à l'architecte brésilien - décédé mercredi soir à l'âge de 104 ans, dans sa ville natale de Rio de Janeiro - l'un de ses joyaux. La Maison de la culture, inaugurée en 1982, renommée officiellement Volcan en 1990.
D'autres n'ont pas attendu cette date pour la rebaptiser à leur manière. Un certain Antoine Rufenacht, conseiller général et opposant municipal alors peu inspiré par les travaux de Niemeyer, popularisa à l'époque le fameux « pot de yaourt », désormais ancré dans le vocabulaire collectif.

« Il citait le Volcan comme l'une de ses pièces maîtresses »
« Il s'agissait avant tout de préoccupations politiciennes, de la part d'une opposition de droite qui critiquait sans discernement toute proposition », tacle Daniel Colliard, alors premier adjoint au maire communiste André Duroméa. Une analyse que validerait presque Antoine Rufenacht. « Vous savez, quand on est dans l'opposition, on porte parfois des jugements excessifs, c'est le propre même de la politique », observe simplement l'ancien maire du Havre.
Le contraste, a priori déroutant, entre les courbes élancées du brésilien et la rigidité géométrique de Perret était « voulu », insiste Daniel Colliard. Nous sommes alors au tout début des années 70. Niemeyer, la soixantaine et l'expérience Brasilia déjà derrière lui, « venait de réaliser le siège du parti communiste à Paris », complète l'ancien adjoint. « Il faisait beaucoup parler de lui. » L'architecte échappait surtout, en France, à la dictature sévissant dans son pays. Exilé, réfugié, qui plus est fervent militant communiste : au-delà de l'artiste, la municipalité ne pouvait qu'être séduite par l'homme de convictions. « C'était aussi une démarche politique au sens fort du terme », confirme Daniel Colliard.

Bernard Mounier, directeur de la Maison de la culture au moment des réflexions initiales, garde pour sa part « le souvenir d'un premier projet, en 1973, qui ne marchait pas du tout, avec une scène tournante. J'ai demandé à rencontrer Oscar Niemeyer pour lui expliquer nos missions. Je me souviens d'un homme affable, aux yeux pétillants d'intelligence. Il avait un bloc de papier : il dessinait au fur et à mesure que je parlais. Le Volcan est né ainsi sous mes yeux, en l'espace de deux-trois heures ».
« Il l'évoquait comme l'une de ses pièces maîtresses », rappelle Antoine Rufenacht. Pourtant, elle n'aura pas totalement réussi dans son entreprise d'appropriation par la population. L'actuelle réhabilitation des lieux est justement censée faire de la partie basse du site le lieu de vie et de passage qu'il aurait toujours dû être. « Il fallait résoudre la problématique de ce que les Havrais appelaient le « trou ». Niemeyer n'avait probablement pas assez pris en compte les préoccupations de vent d'ouest et les difficultés d'accès », note Antoine Rufenacht.
C'est dans le but de solliciter son accord que l'élu rencontra en 2007 l'architecte brésilien, chez lui, près de Copa Cabana. « Il s'est penché de très près sur les dessins, et il a parfaitement compris les enjeux », rapporte l'ancien maire. En 2009, une deuxième entrevue fut malencontreusement annulée in extremis. Antoine Rufenacht devait remettre à Oscar Niemeyer son titre de citoyen d'honneur de la ville du Havre.

 

(source Havre-Libre)

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