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Dimanche 14 Octobre 2012 :

 

Chronique

La feuille de route de Van Rompuy

Par Francis Wurtz (1)

Pendant que les députés et les sénateurs de la majorité gouvernementale sont fermement invités à ratifier le traité budgétaire puis à voter la « loi organique » garantissant le strict respect de la « règle d'or » (l'équilibre des comptes publics quel qu'en soit le prix), le président de la République prépare l'étape suivante, dont il s'est bien gardé jusqu'ici, d'évoquer publiquement les enjeux. Je veux parler de la « feuille de route » dont les chefs d'État et de gouvernement examineront les grandes lignes dès les 18 et 19 octobre, avant de l'adopter en décembre. Rappelons ici de quoi il s'agit. C'est le 23 mai dernier qu'a été décidée la mise en place d'un groupe de travail de haut niveau, composé – excusez du peu… – de Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne, de Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe (réunissant les ministres des Finances de la zone euro), de José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, et de M. Van Rompuy, président du Conseil européen. Ces quatre sommités ont été invitées à rédiger un rapport précisant les « éléments essentiels » des transformations à opérer pour consolider durablement la zone euro.

Puis, fin juin, lors du sommet européen « historique » qui adopta le « pacte de croissance » (et a ainsi tenu lieu de « renégociation » du traité budgétaire pour François Hollande), il y eu un autre point à l'ordre du jour, moins médiatisé que le précédent : la présentation, par M. Van Rompuy, de la synthèse des réflexions de son groupe de travail sur les changements à apporter, selon les quatre dirigeants en question, à la construction européenne, une fois le traité budgétaire adopté.

Une phrase résume l'esprit de ce document de 7 pages : « Progresser vers une plus grande intégration des prises de décisions budgétaires et économiques entre les pays. » Ainsi, « les instances au niveau de la zone euro seront aptes à exiger le changement des enveloppes budgétaires », ou encore, il serait créé « un cadre pour une coordination des politiques plus contraignantes » pour éviter « les politiques inadaptées » et « pour s'assurer de la capacité de s'adapter aux chocs et de pouvoir être compétitifs dans une économie mondialisée ». Invité à préciser sa pensée par un journal allemand, M. Van Rompuy répondait : « On peut engager tous les 27 pays à réformer leur système de retraite dans un temps déterminé, en lien avec l'espérance de vie. (…) Pas seulement avec des recommandations pour qu'après chacun fasse ce qu'il veut, mais plutôt de manière contraignante » (2).

Enfin, conscients de ce que ces « décisions au niveau européen » risquent d'avoir « un impact fort sur la vie quotidienne des citoyens », nos grands démocrates centralisés ont senti la nécessité de… « construire un soutien populaire » (à leurs décisions » grâce à une « implication étroite du Parlement européen et des Parlements nationaux », dans le cadre des modalités prévues dans le traité de Lisbonne. C'est dire l'audace de leur innovation démocratique.

« C'est très contraignant dans le sens de l'austérité. On renforce l'Europe uniquement dans le sens libéral », commenta aussitôt un ministre socialiste… belge, Paul Magnette. On attend toujours le point de vue du gouvernement français. Le Conseil européen des 18 et 19 octobre devrait nous en apprendre davantage.

(1) Député honoraire du Parlement européen.

(2) « Welt am Sonntag » cité par l'AFP le 24 juin 2012.

(L'Humanité Dimanche)

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