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Lundi 27 Août 2012 :

 

Éditorial

Réaction

Par Michel Guilloux

Louis XVI avait une prédilection pour les serrures. François Fillon, lui, cultive le dynamitage des « verrous culturels ». Ainsi le prétendant au leadership de l'UMP qualifie-t-il un des grands « succès » de sa politique, la réforme des universités, dans un entretien de rentrée accordé au magazine le Point de cette semaine. Sa plus grande crainte serait que s'ancre dans les esprits que l'époque vit une « crise du capitalisme », sans précédent, avec des causes et des responsables identifiables et à identifier donc. Non, pour lui, il ne s'agirait que d'un « déclassement » de la France et de l'Europe, qui appellerait des « réformes radicales ». Dans la pensée réactionnaire, « réforme » est un mot dont les Français ont subi les conséquences année après année depuis dix ans. Et à lire l'ancien hôte de Matignon en concurrence libre et non faussée avec son ami Jean-François Copé on hésite. Sommes-nous tombés dans une faille spatio-temporelle telle que les affectionnent les romans de science-fiction ? La droite aurait-elle gagné les élections présidentielle et législatives ? Ou sommes-nous bien plutôt devant le programme d'une droite revancharde qui aiguise ces couteaux pour 2017 ? Dans les deux cas, on peut mesurer ce à quoi nous avons échappé depuis les mois d'avril et mai comme ce qui attendrait le pays en cas de défaite de la gauche à terme.

Suppression des 35 heures dans le privé, entreprise par entreprise, augmentation du temps de travail dans les fonctions publiques, augmentation de la TVA, casse de la protection sociale solidaire, remise en cause de l'assurance chômage... Pas un bouton de guêtre ne manque de la panoplie antisociale du programme porté par Nicolas Sarkozy au printemps avant qu'il ne fût défait. Et tout cela pour « redonner confiance aux investisseurs », ces spéculateurs des marchés financiers qui, après avoir asphyxié l'économie, étranglent les peuples, de la Grèce à l'Espagne. Les forces de l'argent, liguées internationalement, n'entendent pas voir remis en cause ni même écornés leurs privilèges. Battues dans les urnes, elles se réarment sur le terrain économique avec le relais complaisant de médias dont elles sont largement propriétaires. Avec les voix déclamant, en canon et comme autant de disques rayés, les mêmes « éléments de langage » que sous l'ère du président défait à chaque décision prise depuis, ou les sorties de PDG, tel celui d'Unilever, cette semaine, face aux salariés de Fralib, pratiquant sans vergogne le chantage aux « investissements », C'est aussi à cette aune que l'on peut apprécier l'enjeu devant lequel toutes les forces de gauche sont placées.

Notre sondage confirme le verdict des urnes : ce n'est pas de ce côté que les Français voient se lever une espérance d'avenir pour eux et le pays. La formidable vague qui s'est levée pour chasser Nicolas Sarkozy et permettre la victoire de François Hollande est toujours forte d'attente d'un réel changement à gauche. Face au pouvoir de l'argent, à son arme de destruction massive de l'emploi, à la politique de la force en un mot, réimposer la force de la politique, sa réappropriation par le plus grand nombre, est une condition essentielle au changement réel voulu par une majorité dans notre pays. C'est cette ambition que porte le Front de gauche dont les militants vont débattre des moyens d'atteindre cet objectif tout le week-end, avant l'université d'été du PCF, le week-end prochain, puis le rendez-vous de toutes et de tous à la Fête de l'Humanité. Qui sera le temps fort de la campagne en cours contre le traité Sarkozy-Merkel voulant imposer un carcan austéritaire et antidémocratique au peuple et qui interdirait le changement souhaité et nécessaire à construire dès cette rentrée.

(l'Humanité du Vendredi 24, Samedi 25 et Dimanche 26 Août)

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