> Presse —>À Vitry, la nuit du 4 août fait toujours parler d'elle |
Mardi 7 Août 2012 :
À Vitry, la nuit du 4 août fait toujours parler d'elle Dans cette commune du Val-de-Marne, samedi, la section locale des communistes organisait son troisième rendez-vous à l'occasion de l'anniversaire de l'abolition des privilèges décidée par les révolutionnaires de 1789. Place de l'Église, devant la Maison des communistes, les Vitriots arborent la cocarde en cette soirée du 4 août. Dans une atmosphère de kermesse, on discute autour d'un repas dans cette ville de 85 000 habitants. La nuit du 4 août 1789 est un moment emblématique de l'histoire de France. Elle marque l'abolition des privilèges. Dans le tourbillon révolutionnaire qui embrasait alors le pays, les députés avaient aboli les droits féodaux face à la pression populaire. Une forme moderne de féodalité Ce rassemblement anniversaire a vu le jour en 2010. À l'époque, l'objectif était de faire « un clin d'oeil à 1789, en plein ère du sarkozysme », rappelle une Vitriote à l'origine de cette initiative. Dans son discours samedi, Luc Vallot, l'un des responsables de la section du PCF de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), a rappelé que « Sarkozy a multiplié les lois à l'Assemblée nationale pour favoriser ses amis : banquiers, spéculateurs, rentiers. Elles furent faites et défaites au service d'une classe dominante, celle de la grande bourgeoisie, celle des privilégiés ». Trois ans après, on se réjouit de la défaite de la droite. « Abolition du bouclier fiscal, fin de l'allégement des cotisations sur les heures supplémentaires et du "travailler plus pour gagner plus", hausse de l'impôt sur la fortune, augmentation des taxes sur les parachutes dorés, ces mesures vont dans le bon sens mais elles ne suffisent pas. » Joël Abadie, un habitant de Vitry, porte un regard très critique à l'encontre de la nouvelle majorité socialiste : « Smic pas réévalué, gel du salaire des fonctionnaires et surtout pas de politique de croissance. Le changement se fait à la marge alors qu'il devrait passer par des mesures structurelles. » Un écho à la situation économique de la ville C'est dans ce contexte politique que les communistes ont fait le choix de ne pas participer au gouvernement socialiste. Ils soutiennent, malgré tout, les mesures qui s'engagent vers le progrès social. Pour Pierre Bell-Lloch, jeune conseiller général du Val-de-Marne, l'abolition des privilèges fait écho à la situation économique de sa ville. L'entreprise Pilkington, fabricant de verre et premier concurrent mondial de Saint-Gobain, menace de fermer son site de Vitry pour des raisons financières. « Pilkington va délocaliser son activité à l'étranger mais refuse de céder l'entreprise à des repreneurs. On est donc face à une entreprise qui gagne de l'argent, qui a la possibilité de maintenir l'emploi et qui ne veut pas le faire. Les possédants font ce qu'ils veulent, dans une forme moderne de féodalité. Le symbole du 4 août doit servir aujourd'hui. » Pour Djamel Hamani non plus, « pas sûr que ce soit la fin des privilèges ». Ce conseiller municipal rappelle que la crise économique est avant tout une crise financière. Lui considère que, dans le système actuel, les banques font figure de privilégiées. Dans la tourmente financière, les banques ont été sauvées grâce à l'argent public. Mettre fin aux privilèges des banques « Faire payer la facture de la dette aux citoyens, c'est accorder des privilèges aux banques. » Pour lui, il faut renverser la politique de la Banque centrale européenne. « Cette institution monétaire fonctionne à partir des règles absurdes. La banque centrale américaine, la Fed, elle, fait tourner la planche à billets. Il faut une intervention de la BCE pour venir en aide aux États. » Du 18 au 22 juillet, il s'est rendu aux journées du Parti de gauche européenne (PGE) en Grèce. « Le Front de gauche n'est pas isolé en Europe. Avec Die Linke en Allemagne, Syriza en Grèce et d'autres, il y a des convergences. La campagne du Front de gauche a inspiré l'Europe. » Comme en 1789, quand le vent révolutionnaire venu de France avait soufflé sur le continent. Le Front de gauche a recueilli 20 % des voix à Vitry à la présidentielle et 23,3 % aux législatives. Avec la défaite de la droite, tout le monde s'accorde à dire que la campagne a été un réel succès. Malgré tout, certains, comme Joël, s'interrogent encore sur les stratégies politiques à conduire. Bien que le Front de gauche ait progressé en voix lors des législatives, le siège de la dixième circonscription a été perdu. À Vitry, l'action pour abolir les privilèges se conjugue avec la poursuite de la réflexion pour élargir l'influence du Front de gauche. Guillaume Letourneur (l'Humanité)
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