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Vendredi 20 Juillet 2012 :

 

Éditorial

Donnons de la voix

Par Jean-Paul Piérot

Le pacte budgétaire, qui risque de cadenasser l'Europe dans une austérité à perpétuité, va-t-il s'imposer aux peuples sans que ceux-ci aient droit au chapitre ? Telle est la question que l'Humanité pose aujourd'hui dans toute sa gravité. Fidèles aux combats que nous avons menés pour que l'Europe devienne enfin une chance pour un progrès social partagé, nous mettons à nouveau nos colonnes à la disposition d'un débat fondamental. Fondamental pour l'avenir de la construction européenne, pour la survie même de l'espoir européen, fondamental également pour préserver dans chaque pays de l'Union la possibilité pour les citoyens de mettre en place de véritables politiques de gauche.

On lira avec intérêt, dans ce numéro de l'Humanité, l'analyse de Patrick Le Hyaric, qui débusque tous les dangers que recèle le « traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire » et la prise de position de la députée socialiste Marie-Noëlle Lienemann, hostile à la ratification par la France de ce traité, qui porte la marque de ses auteurs, Angéla Merkel et Nicolas Sarkozy. Ce texte apparaissait d'ailleurs tellement lié à la pression libérale de ces deux dirigeants de droite en Allemagne et en France, que, des deux côtés du Rhin, le pacte s'est fait connaître sous le patronyme de Merkozy.

La France disposait d'une opportunité de taille avec le changement politique survenu au printemps. Le fait que François Hollande se soit engagé tout au long de la campagne de l'élection présidentielle pour une renégociation du trait joua un rôle certain dans le soutien majoritaire qui l'a conduit à l'Élysée. Cette prise de position allait à la rencontre des quatre millions d'électeurs du Front de gauche, dont le report des voix fut décisif, mais aussi d'un grand nombre de membres et de sympathisants du Parti socialiste qui avaient pris leur part dans la victoire de « non » à la constitution européenne en mai 2005. Dans sa majorité, la gauche n'acceptait pas un texte qui érigeait le libéralisme économique en horizon indépassable de toute politique européenne. À l'époque, le recours à la forme référendaire n'était pas inscrit d'avance dans l'agenda politique. Il a fallu un mouvement citoyen sans précédent pour exiger que le peuple fût consulté, pour porter le projet à la connaissance du plus grand nombre et pour organiser le débat public. Jamais, depuis la signature du traité de Rome en 1957, la question européenne ne suscita autant d'intérêt populaire qu'en 2005. La suite des événements est connue : Nicolas Sarkozy, sitôt élu en 2007, foula aux pieds le vote des Français et, de concert avec Angela Merckel, imposa le traité de Lisbonne, qui devait éviter que l'Europe ne sombrât dans la crise. Les peuples ont durement mesuré la réalité qui s'en suivit.

Force est de déplorer aujourd'hui que le nouveau président n'a pas honoré la promesse du candidat. Ce n'est pas renégocier un traité que se contenter d'ajouter un paragraphe sur la croissance sans remettre en question l'arsenal anti-souveraineté populaire qui le parcourt. C'est au nom d'une haute conception de l'Europe, sociale et démocratique, que l'Humanité relance le débat, diffuse une pétition, pour qu'en dernière analyse le peuple soit l'unique souverain consulté par référendum. D'ici à la Fête de l'Humanité, donnons de la voix.

(l'Humanité)

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