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Lundi 11 Juin 2012

 

Éditorial

Un scrutin de confirmation

Par Patrick Apel-Muller

Les électeurs ont confirmé leurs choix de l'élection présidentielle en mettant de nombreux candidats de gauche en situation de battre les députés UMP sortants. Les hiérarques de la Sarkozye défaite espéraient une session de rattrapage... Ils ne l'ont pas obtenue des électeurs. Tout juste peuvent-ils parier sur le lot de consolation d'un solide groupe d'opposition à l'Assemblée. La droite, cependant, ne subit pas une déroute et tente de plastronner en se targuant d'être une première force parmi les forces politiques. En fait, nous assistons à une très forte bipolarisation, qui a favorisé UMP d'un côté et PS de l'autre.

C'est, hélas, l'un des effets de la limitation du mandat présidentiel à cinq ans et la réduction institutionnelle des élections législatives à un scrutin de confirmation. Le présidentialisme forcené conduit à une déformation de la réalité politique du pays, encore amplifié par l'absence de proportionnelle. Le taux d'abstention, qui dépasse les 40 %, témoigne de l'impasse dans laquelle a plongé cette réforme en dévalorisant une Assemblée nationale à laquelle, pourtant, toutes les lois seront soumises. Ce sont en effet les députés qui décideront des réformes et non l'Élysée. C'est dire combien leur couleur politique comptera. L'abstention exprime aussi sans doute une certaine prudence d'une partie de l'électorat qui craint que les changements espérés ne soient pas forcément au rendez-vous.

EELV, qui s'était subordonné aux investitures socialistes et dont le score ne peut guère être dissocié de celui de son puissant allié, voit ses espoirs amoindris par le succès de plusieurs candidatures dissidentes issues du PS. Le Modem se cantonne dans un réduit qui témoigne sans doute de la fin du rêve centriste qu'avait caressé François Bayrou. Le Front de gauche, dont l'ensemble des candidats est en progression sur les résultats de 2007 mais en retrait sur son score d'avril, peut, dimanche, obtenir un groupe à Assemblée nationale. Ainsi pourrait-il jouer le rôle d'une force active, constructive, indépendante, pour que les espérances de changement qui parcourent le pays trouvent une matérialisation. Il y faudra une ambition et une résolution que l'on sait trouver dans ses rangs. Avec autour de 7 %, le Front de gauche est la deuxième force de gauche. À Hénin-Beaumont, après un beau combat, un progrès de 8 points et de plus de 1000 voix par rapport à l'élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon est dépassé par le candidat du PS. Dimanche, toutes les voix des démocrates se rassembleront pour battre Marine Le Pen, qui a déjà aspiré une grande partie des voix UMP. Le Front national obtient, avec près de 14 %, un score trop élevé, haut pour des élections législatives, mais en deçà de ses espérances : il sera présent dans un nombre limité de triangulaires, sans qu'on puisse exactement les dénombrer à l'heure où ces lignes sont écrites.

Hier, Jean-François Copé, en se livrant à un parallèle déshonorant entre le FN et le Front de gauche, a donné un avant-goût de ce que décideront aujourd'hui les instances de l'UMP à l'égard de l'extrême droite. L'ambiguïté sera la règle et augure les recompositions-décompositions de la droite à venir. À gauche, la mobilisation doit donc être de règle et particulièrement là où des candidats du Front de gauche restent en lice. Élus, ils seront une assurance pour les changements.

(l'Humanité)

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