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Jeudi 3 Mai 2012 :
Éditorial Un vote de salut public Par Patrick Apel-Muller Nicolas Sarkozy est prêt à tout pour l'emporter, aux demi-vérités et aux gros mensonges, aux procédés obliques et aux attaques frontales. Il l'a encore confirmé hier soir lors de son débat télévisé, son ultime chance de déjouer la perspective que le premier tour semble lui destiner. Pour rallier l'électorat frontiste, il en a fait des tonnes ces derniers jours contre les immigrés, les syndicalistes, les salariés. Alors qu'au cours du meeting de Marine Le Pen ses partisans hurlaient le tube de toujours de l'extrême droite, « communistes assassins », comme en écho au Trocadéro, le président candidat dénonçait « le drapeau rouge, étendard de tant de tyrannies ». Et il enjoignait aux syndicalistes de « poser » leur étendard et de cesser de « préférer leur parti à la France ». On n'est pas si loin de « l'anti-France » qui aurait ajouté aux vapeurs pétainistes dont il s'est entouré. Qu'en a-t-il fait de la France, plus meurtrie que jamais par la mondialisation capitaliste, affaiblie par l'appétit forcené de profit d'une caste, divisée par l'insidieux poison de la haine de l'autre ? Le même jour de ce meeting, dans les beaux quartiers, le ministre de la Défense, Gérard Longuet, donnait un entretien au journal historique de l'extrême droite, Minute (rallié à la candidature Sarkozy), dans lequel il jugeait possible de dialoguer avec Marine Le Pen dont il qualifie le score de « très respectable ». Certains commentateurs croient bon d'y voir un simple retour du refoulé chez un ancien militant d'une organisation fascisante... mais que ne s'interrogent-ils pas de voir un personnel politique aussi équivoque au premier rang des partisans du candidat UMP ? Une partie de la droite fait miroiter une alliance aux électeurs FN pour conserver le pouvoir, tandis que l'autre avoue des haut-le-coeur, sans avoir cependant le courage de débarquer de cette galère. Ce radeau de la Méduse peut se laisser aller au pire. Nicolas Sarkozy, de meetings en débats, ne se contente pas de franchir les lignes blanches ou de multiplier les dérapages. Il dessine un régime autoritaire où les syndicats désarmés ne pourraient plus s'opposer à la casse des statuts et du Code du travail, où les déréglementations le disputeraient aux privatisations, où la loi du plus riche ne connaîtrait pas d'entrave ni l'austérité de limites. Ses tirades contre les médias devraient alerter. Les plus puissants d'entre eux avaient pourtant fait assaut de docilité pendant des années. Cela ne suffit plus. C'est pourquoi battre le président sortant devient un geste de salut public et le bulletin Hollande est impératif pour tourner la page d'un quinquennat qui signe la période la plus sinistre de la Ve République et s'épargner un futur qui serait pire encore que ce bilan. (l'Humanité)
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