> Presse —>Danger pour vos salaires ! |
Dimanche 4 Mars 2012 :
Ce que préparent Sarkozy, Merkel et l'Union européenne En Grèce, le salaire minimum vient d'être abaissé de 22 %. En France, on n'en est pas encore là, certes ! Mais d'allégements de cotisations sociales en gels des salaires, de chantages patronaux en mesures sarkozystes, Les salariés sont en train de subir un véritable racket sur la rémunération de leur travail. Dernière trouvaille pour donner l'illusion d'une hausse des petits revenus, la redistribution des cotisations sociales en salaire. Une hausse financée par les salariés eux-mêmes ! Boniments et tours de passe-passe. D'une émission de télé à l'autre, le président candidat proclame son souci de « la France qui travaille », remake éculé de sa campagne de 2007. Et diverses mesures et projets censés la combler. Au nom de la lutte contre les délocalisations, il y a d'abord eu la TVA « sociale » : 13,2 milliards d'euros de nouvelles baisses de cotisations sociales patronales compensées notamment par une hausse de 19,6 % à 21,2 % du taux normal de TVA, soit 10,6 milliards d'euros pris dans la poche des ménages. Pour, au mieux, 45 000 créations de postes et, au pire, 16 000 destructions d'ici 5 ans, selon les calculs de l'OFCE. Voici maintenant la hausse des petits salaires (de 1 à 1,2 fois le SMIC, soit 1 098 euros à 1317 euros n et par mois). Nicolas Sarkozy a toujours des explications simples : « On supprime des charges sur leurs salaires pour augmenter leurs salaires » (France 2, 22 février). Et on arrive à un gain de « 1 000 euros par an » pour 7 millions de salariés. Reprenons : une partie des cotisations sociales salariales sur les bas salaires serait distribuée immédiatement sous forme de salaire. Pas un sou sorti des caisses du patronat ! Les salariés eux-mêmes financeraient ce petit plus, au détriment de leur protection sociale. Pour combler le trou, entre autres, on supprimerait la prime pour l'emploi, actuellement versée à 8,2 millions de travailleurs pauvres. On pique aux pauvres pour redonner à d'autres pauvres. Calculs faits, cette vaste partie de bonneteau aboutirait en fait à un gain moyen annuel de 570 euros par salarié concerné... duquel il faut déduire la prime pour l'emploi que beaucoup touchaient puisqu'elle serait supprimée. Soit, au bout du compte, 70 euros par an (5,83 euros par mois) pour un smicard célibataire. L'autoproclamé « candidat du peuple » enrobe si bien l'affaire que l'on pourrait s'y laisser prendre ! Il ne fait pourtant qu'égrener le programme du MEDEF : baisser « les charges » - terme pesant et mensonger utilisé pour désigner les cotisations sociales – pour baisser le« coût » du travail. C'est-à-dire son prix, les salaires, en s'attaquant insidieusement à leur partie socialisée pour mieux noyer le poisson. Mais au-delà aussi, si possible ! L'économiste en chef du FMI, Olivier Blanchard, le dit haut et fort : les « sacrifices budgétaires » ne suffiront pas, il faut baisser les salaires dans les pays fragilisés de la zone euro (« le Monde », 20 avril 2011). L'affaire est en cours. Où s'arrêtera-t-elle ? En France, depuis 2008, au nom de la crise, plusieurs entreprises s'efforcent déjà d'installer cette baisse. En augmentant le temps de travail de 35 à 40 heures sans que le salaire suive chez Continental Clairoix, en 2008. L'usine a fermé quelques mois plus tard ! Pour les cadres et sur la base du volontariat chez Hertz ou Hewlett-Packard, en 2009. En transformant du salaire fixe en rémunération variable pour les commerciaux chez IBM. Au nom de la sauvegarde des emplois, par avenants aux contrats de travail chez Poclain Hydraulics (baisse du temps de travail et de la rémunération de 5 à 15 %. Par abandon de jours de RTT sans contrepartie chez General Motors Strasbourg... Dans la version 2011 de leur rapport « Refonder le droit social », dans le cadre du Conseil d'analyse économique, Gilbert Cette (économiste) et Jacques Barthélemy (spécialiste de droit social) préconisaient d'introduire en France, à l'instar de l'Allemagne, des « accords collectifs d'entreprise permettant, contre des garanties de maintien de l'emploi, des baisses transitoires de la durée du travail et des salaires ». En gros, les fameux « accords de compétitivité », annoncés fin janvier par Nicolas Sarkozy, sur lesquels syndicats et patronat ont été priés d'ouvrir des négociations. Des accords d'entreprise qui surpasseraient la loi et permettraient de modifier les contrats de travail individuels sans l'accord des salariés concernés. Flexibilité maximale pour les patrons, insécurité financière maximale pour les salariés. Si l'on ajoute les gels de salaires déjà à l'oeuvre dans bon nombre d'entreprises, ainsi que le gel du point d'indice dans la fonction publique, la pingrerie qui prévaut dans les négociations salariales, le refus de tout coup de pouce au SMIC depuis 5 ans, les pressions à la baisse sur les salaires d'embauche... il est clair que le projet de faire baisser les salaires – pour permettre aux entreprises de gonfler leurs marges et de s'adapter, à leur profit, aux réorganisations économiques mondiales – ne concerne pas que la Grèce ! Déjà en France, le salaire mensuel moyen a augmenté deux fois moins que les prix au dernier trimestre 2011. Dominique Sicot (L'Humanité Dimanche)
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