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Dimanche 5 Février 2012 :
Éditorial Nuit toxique à l'Assemblée Par Patrick Apel-Muller La nuit est propice aux forfaits. L'Assemblée nationale fut le théâtre, mercredi soir, d'un de ces crimes contre la démocratie auxquels se livre le régime Sarkozy. Un jour, la souveraineté populaire exprimée sans ambiguïté sur le traité constitutionnel en 2005 est poignardée. Un autre, le pouvoir parlementaire sur le budget de la nation est abandonné aux oukazes de Mme Merkel. Et à plusieurs reprises, le droit de grève est violé. Cette fois-ci, il fallait un homme de main que les scrupules n'étouffent pas ; ce fut Frédéric Lefebvre. Il a fait ratifier une proposition de loi UMP simplifiant la vie des entreprises, un texte technique d'apparence anodine, mais qui supprime purement et simplement la durée légale du travail. Plus d'autres bornes que celles décidées par le patron ! Retour vers les ténèbres sociales du XIXe siècle ! Par ailleurs, dans le fatras d'un texte fourre-tout, le projet de loi de finances relative 2012, a été glissé un article vénéneux qui instaure la TVA « sociale » et la baisse des cotisations patronales. Côté lumière et caméras, le président de la République reçoit ce matin des ouvrières de Lejaby ou fait mine de consulter syndicats et parlementaires tandis qu'il dépêche dans l'obscurité d'un quarteron de députés expédier ad patres les droits des salariés. C'est la version UMP du courage... « Ce coup de force n'aura pas eu d'autre but que d'utiliser le Parlement comme un instrument de propagande élyséenne à des fins électoralistes », a déclaré le chef de file des députés du Front de gauche, Roland Muzeau, comme en écho à la stigmatisation par Jaurès de « la fanfaronnade d'une force débile et agitée ». Heureusement, les électeurs ont en main de quoi faire échouer ce méfait, un bulletin de vote qui balaierait Nicolas Sarkozy et les politiques d'austérité. Sans quoi, dès le mois de juillet, ces mesures que l'opinion refuse (voir notre sondage CSA-l'Humanité d'hier) terniraient l'été, plomberaient les vacances de millions de salariés. Jusqu'au bout, le président de la République a décidé d'appliquer le programme dont le Medef et Laurence Parisot avaient passé commande à l'aube de son quinquennat. Hier encore, à Longjumeau, il a complété la bouffonnerie de l'augmentation des droits à construire par la promesse de nouveaux cadeaux aux promoteurs immobiliers en supprimant les droits de mutation qui apportent des ressources aux collectivités locales. Cet empressement à servir encore plus copieusement les privilégiés peut être interprété de plusieurs manières. Il y a du quitte ou double dans cette « réorganisation » ou « thatchérisation » du régime. À qui a vendu son âme aux marchés financiers, il devient interdit de refuser quoi que ce soit. Mais qui sait, peut-être cette précipitation de majordome témoigne-t-elle de la préparation d'une reconversion pour « faire de l'argent » ? Ce serait un moindre mal pour le pays... Au contraire, le nouveau plan d'austérité injecté en catimini au Parlement ouvrirait la voie à une récession durable, celle à laquelle conduisent toutes les politiques de compression des salaires et de diminution des dépenses publiques ou sociales... (l'Humanité)
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