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Jeudi 2 Février 2012 :

 

« On espère une bouffée d'oxygène »

Appelés à faire grève, hier, contre la réforme de l'évaluation et les suppressions de postes, les enseignants attendent les prochaines élections présidentielles avec circonspection.

« On est dans l'expectative... » À moins de trois mois de l'échéance présidentielle, les enseignants qui manifestaient, hier, dans les rues de Paris contre la réforme de l'évaluation et les suppressions de postes abordent les futures élections avec pas mal de circonspection.

Évidemment, le rejet du gouvernement actuel met tout le monde d'accord. « Dans les salles de classe, le peu de collègues qui avaient voté pour Sarkozy en 2007 le regrettent amèrement, souligne Véronique, responsable du Snuipp-FSU dans les Pyrénées-Orientales. Je peux vous dire que dans l'éducation, il est complètement grillé ! »

Alors que le quinquennat touche à sa fin, le tribut payé par les écoles de son département est lourd. À la rentrée prochaine, le premier degré accueillera 322 élèves supplémentaires mais perdra 41 postes. « Ces dernières années, la scolarisation des moins de trois ans a chuté à 11 % et le nombre moyen d'élèves en maternelle a bondi à 28 par classe », énumère Véronique.

Dans le secondaire, la situation n'est pas meilleure. « Il nous faudrait recréer 150 postes pour revenir au taux d'encadrement de 2007, explique Marc Moliner, responsable du Snes dans le département. Aujourd'hui, la norme est d'avoir 36 élèves par classe en seconde ! Le pire, c'est que l'éducation prioritaire est la plus touchée. À Perpignan, deux établissements avaient des dispositifs pour scolariser les enfants gitans, ils n'arrivent plus à les assurer... »

« On a envie que la casse de l'école s'arrête »

Alors, imaginer une réélection du président sortant lui fait lever les yeux au ciel. « On sera alors la cible numéro 1, poursuit Marc, sous son bonnet. Non, les enseignants, mais aussi tout le système éducatif public que l'UMP veut démanteler. » Pour autant, les propositions du candidat socialiste ne l'emballent pas. Et il avoue « se retrouver beaucoup plus » dans le programme du Front de gauche.

Même scepticisme à l'égard de François Hollande pour Nicolas, prof de maths dans un collège de l'Ain. « On a envie que la casse de l'école s'arrête, c'est sûr, mais franchement, le programme du PS ne me rassure pas beaucoup plus. Les 60 000 postes, on ne sait pas si ce sera des redéploiements ou non. Son positionnement n'est pas clair non plus sur l'autonomie des établissements et le statut des enseignants, dont il a fait une question centrale comme la droite... » Au final, le jeune homme espère que le programme du PS sera « infléchi ». « Les cinq années passées ont provoqué une grande lassitude chez les enseignants, ils attendent une bouffée d'oxygène. »

Un parapluie noir à la main, Roselyne, Maître E (pédagogue) dans un réseau d'aide à la difficulté scolaire (Rased) de Seine-et-Marne, est sur la même longueur d'onde. « On parle de rythmes, de gestion d'établissements... C'est important, mais les candidats ne s'intéressent pas assez au fond, à commencer par la prise en compte des élèves en échec. Je rappelle que 6000 postes de Rased auront disparu en cinq ans. » Comme beaucoup d'autres, elle prévient : « Si la gauche passe, on restera extrêmement vigilants. »

Laurent Mouloude

(l'Humanité)

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