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Jeudi 29 Décembre : 2011:
Éditorial Tableau avant Nouvel An Par Maurice Ulrich Toujours plus de familles en difficulté, des dizaines de milliers de personnes supplémentaires dans les files d'attente des Restos du coeur, ce qui n'a pas interpellé le chef de l'État, au cours de sa visite indécente, dans un de leurs centres, voici à peine quinze jours... Chômage et précarité en hausse pour toujours plus de jeunes mais pas seulement. Et aussi hausse des tarifs du gaz, hausse des tarifs de la SNCF dont le président, Guillaume Pepy, s'était bien gardé d'annoncer la couleur au moment de la grande opération de promotion des changements d'horaires... Voilà, à quelques heures de l'année 2012, une partie du tableau social dans la cinquième puissance du monde, menacée de surcroît de fatwa économique par les ayatollahs du triple A, ne tirant leur légitimité que d'eux-mêmes, dans une vision qui n'en est pas à une contradiction près, comme d'exiger des coupes dans les dépenses publiques avant de s'inquiéter de leurs conséquences négatives pour les perspectives de croissance. Le chef de l'État, Christine Lagarde n'ont cessé de mentir, de nous tromper et peut-être de se tromper eux-mêmes, parfois, tant ils sont dans le déni des conséquences de leur politique, sur les chiffres de la croissance. Aujourd'hui, la France est en récession. Il est là, le bilan de Nicolas Sarkozy. Et il va de département en département, comme un bateleur de foire, nous chanter le « Produisons français », dont tous les bien-pensants se gaussaient quand les communistes en parlaient. Et il va s'inquiéter devant des publics choisis pour répondre gentiment aux poignées de main, les « pauvres cons » étant écartés, de la désindustrialisation de la France. Selon une étude publiée hier par les Échos, près de 900 usines ont fermé en France depuis 2009, représentant environ 100 000 emplois industriels. Parmi les sites fermés, celui de Gandrange où il était venu faire voir ses muscles, affirmant qu'il le sauverait. La faute à la crise, va dire l'UMP, renouant sans vergogne avec les argumentations les plus éculées. Ce qui va mal, c'est la faute à pas de chance, la conjoncture, le voisin voire l'étranger, la concurrence des pays émergents, la météo. Ce qui va bien, c'est le résultat de la bonne politique menée. Mais même cela semble difficile à tenir, car la réalité, c'est que tout va mal, et c'est le résultat de la politique menée. Des entreprises ferment, des emplois disparaissent, mais en quelques années les placements financiers des banques n'ont fait que grimper, quand leurs politiques de crédit, dont le crédit aux entreprises, étaient largement orientées à la baisse. Hier, on apprenait que toutes les banques de la zone euro, alimentées par des prêts géants de la BCE, stockaient leurs magots. Pour en faire quoi, quand une des solutions clés à la désindustrialisation, c'est une politique de relance, donc de crédit, donc de croissance et d'emploi ? Et c'est aux banques que la BCE a prêté, au lieu de prêter directement aux États. Voilà l'Europe Merkel-Sarkozy. Il y a toujours plus de pauvres et le pays lui-même s'appauvrit. Moins de charges pour les entreprises, moins de services publics, c'est toujours plus pour la finance. Mais une politique de croissance, ce n'est pas une politique du profit. Pour que les entreprises tournent, il faut de la consommation, et il faut des routes, des rails, de la formation, de la recherche. Fondamentalement c'est cela, la dépense publique, et cette dépense-là, c'est de l'investissement. C'est là-dessus que la gauche, toute la gauche devrait se battre, clairement. (l'Humanité)
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