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Lundi 21 Novembre 2011:

 

Espagne : le changement de rigueur

Hier, avant même la fin du scrutin, la messe semblait dite. Le seul suspense qui régnait sur les urnes espagnoles concernait la nature de la majorité de la droite, relative ou absolue. Et le taux de participation des électeurs. Après sept ans de gouvernement socialiste, les électeurs espagnols ont perdu leurs repères politiques. C'est d'abord par la faute de Zapatero, bien sûr. Il peut difficilement s'exonérer de la déroute qui frappe aujourd'hui son parti. Mais comme les autres dirigeants européens qui traversent aujourd'hui une phase de disgrâce dans leur pays, il est aussi victime de la crise économique et financière historique, qui a déjà provoqué avant lui la chute des gouvernements d'Irlande, du Portugal, de Grèce ou d'Italie. Sans doute parce qu'il ne l'avait pas suffisamment anticipée, mais qui l'a fait en Europe ? Probablement parce qu'il a pris des décisions à contretemps, en croyant trop longtemps à l'illusion d'un miracle économique espagnol, illusion alimentée par une folie bâtisseuse rimant avec endettement. Parce qu'il s'est décidé trop tard à mettre en place un véritable plan de rigueur. Mais ce qu'il paye avant tout aujourd'hui, ce sont les 5 millions de chômeurs que compte le pays. Les 40 % des jeunes sans emploi, les salaires en baisse, les retraites qui reculent... Bref les conséquences de sa politique de rigueur. Il n'est pas le premier à en faire les frais, et sans doute pas le dernier. À quelques heures du scrutin, le nouveau Premier ministre pressenti, Mariano Rajoy, demandait un répit : « Laissez-moi au moins une demi-heure... » Il n'en aura pas beaucoup plus, avant de devoir à son tour mettre en place son plan, qui devra forcément être plus draconien, plus douloureux pour son peuple, que celui de son prédécesseur. C'est ainsi qu'il en va dans ce monde nouveau où les marchés imposent leur loi. La hausse des taux d'intérêts qui rend chaque jour la dette plus difficile à rembourser, appelle toujours plus de rigueur, de douleur. Et comme son prédécesseur, mais aussi les autorités de Londres, Paris ou New York, Mariano Rajoy devra faire face à ces « indignés », qui viendront lui rappeler, en occupant l'espace public, que c'est précisément cette politique qui a fait tomber Zapetero, sans pour autant enrayer la spirale infernale de la spéculation. Sans porter de jugement sur les capacités du nouveau Premier ministre, on peut se demander comment il pourra échapper à cette logique implacable. Tant que l'Europe continuera sur la voie que choisissent, au jour le jour, ses deux leaders, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, on ne voit pas comment les pays les plus faibles, c'est-à-dire ceux du Sud, pourraient échapper à une catastrophe annoncée. Vendredi, Angela Merkel a confirmé qu'elle n'envisageait absolument pas de changer une politique qui a fait ses preuves. Qui conforte chaque jour la puissance allemande, mais risque d'envoyer l'Europe dans le fossé

(Havre Libre)

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