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Dimanche 20 Novembre 2011:

 

Mauvaise note pour l'évaluation

Révélé mardi, le projet de réforme de l'évaluation et de l'avancement des enseignants rencontre l'opposition de la plupart des syndicats. Une journée de grève est d'ores et déjà annoncée pour le mois de décembre.

« Totalement inacceptable. » Le projet du ministère de l'Éducation nationale de réformer profondément l'évaluation et l'avancement des enseignants à la rentrée 2012 prend des allures de chiffon rouge. Dévoilés mardi par le site Café pédagogique (lire l'Humanité du 16 novembre 2011), les projets d'arrêté et de décret ont dressé contre eux l'ensemble des syndicats. « Il n'est pas question de prendre en catimini un arrêté sans qu'il y ait eu de concertation », a tenté de calmer Luc Chatel. Las, hier soir, une intersyndicale devait se tenir au siège du Snes-FSU, qui a d'ores et déjà appelé à une journée de grève pour le 12 ou le 13 décembre.

L'idée du ministère est de mettre fin à la double notation des enseignants du secondaire : L'administrative, par le chef d'établissement, et la pédagogique, la plus importante pour la carrière, par l'inspecteur régional, formé dans la discipline des collègues qu'il inspecte. À la place, tous les enseignants seraient évalués lors d'un entretien, tous les trois ans, avec leur seul « supérieur hiérarchique direct », à savoir l'inspecteur de l'éducation nationale dans le primaire et le chef d'établissement en collège et lycée. Ce dernier aura la charge d'évaluer l'enseignant sur sa discipline, mais aussi sur des aspects aussi subjectifs que sa « capacité à faire progresser chaque élève » ou encore sa « pratique professionnelle dans l'action collective de l'établissement ». Une toute-puissance qui a fait bondir l'ensemble des syndicats de la FSU, y compris celui des chefs d'établissement, qui estiment que ces derniers n'ont pas les compétences pour évaluer le travail pédagogique et disciplinaire. « Le dispositif risque de tourner rapidement à une application caricaturale de la "gestion managériale"», ajoute l'Unsa éducation.

La mainmise des chefs d'établissement est d'autant plus inquiétante que leur avis serait également déterminant dans l'évolution de carrière des enseignants du second degré. Le ministère prévoit, en effet de modifier les grilles d'avancement, remplaçant les trois rythmes actuels (ancienneté, choix et grand choix) par un « rythme unique », dont l'accélération – ou non – dépendrait de l'évaluation. « C'est la porte ouverte à encore plus d'arbitraire ! » s'indignent en choeur les syndicats.

In fine, cette réforme du déroulement de carrière permet surtout au ministère de faire de belles économies budgétaires, en ralentissant notamment les progressions les plus rapides. Il fallait, par exemple, dix-sept ans aux mieux notés pour atteindre le 10e échelon (et le salaire qui va avec)). Avec le projet, il leur faudra désormais attendre vingt et un ans de... Pas très classe comme entourloupe. Surtout que les salaires des enseignants français, hors primes, sont déjà parmi les plus bas de l'OCDE.

Laurent Mouloud,

(l'Humanité, vendredi 18 Novembre)

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