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Mercredi 16 Novembre 2011:

 

Lebas, camarade retraité !

Interview. À 60 ans, le militant quitte la tête de l'Union locale CGT du Havre, un poste qu'il a occupé pendant dix ans.

Son modèle : le Che, dont le visage et la célèbre devise trônent dans son bureau : « Soyez réalistes, demandez l'impossible ». Un bureau qu'il va bientôt laisser à d'autres, après l'avoir occupé pendant dix ans. Pierre Lebas, 60 ans depuis peu, quitte en effet la tête de l'Union locale CGT du Havre à l'occasion de son congrès organisé demain et vendredi, à Franklin.

Celui qui a conduit tant de manifestations – au sens propre – au volant de l'emblématique Renault Kangoo rouge revient sur ses décennies de militantisme qui, elles, ne connaîtront pas d'âge légal de la retraite.

« J'ai encore plein de patrons à emmerder ! »

Si vous deviez citer une lutte en particulier ?

Pierre Lebas. « Il y a d'un côté les luttes nationales : là, il faut reconnaître que l'on a fait fort dans la bataille des retraites ! Sur le plan local, il y a eu la fermeture des ACH dans les années 90, ou encore le départ du France : je me souviens avoir occupé l'immeuble du Port autonome. Quand j'y repense, nous avons fait des choses qui ne seraient plus possibles aujourd'hui : je me rappelle aussi du détournement d'un camion qui transportait des châssis automobile étrangers pour Sandouville ! Je reste quand même persuadé qu'il faut savoir bousculer les habitudes... »

Vous évoquez des batailles pour la plupart perdues. Y en a-t-il eu d'abandonnées trop tôt ?

« Celle des retraites, évidemment ! Certaines confédérations ne se sont pas engagées, d'autres y sont allées à reculons, d'autres ont quitté le bateau en cours de route... Si l'on avait poursuivi sur la lancée des premières manifestations, nous aurions obtenu davantage de succès. »

Comment voyez-vous votre retraite ?

« Je dis souvent en riant que j'aimerais vivre jusqu'à 120 ans, parce que j'ai encore plein de patrons à emmerder ! Je vais rester de toute façon à la direction de l'Union locale, en prenant un peu plus de recul. Sans oublier mon mandat politique ! Je serais plus disponible pour l'exercer [NDLR: Pierre Lebas est conseiller municipal à Gonfreville-l'Orcher]. Et je serai aux côtés de mes camarades dans les batailles électorales à venir. »

Que pensez-vous de la gauche havraise ?

« Compte tenu des résultats des dernières élections, je reste persuadé que le Parti communiste a toujours un rôle à jouer. J'ai toutes les raisons d'espérer une liste d'union en 2014, avec toutes les composantes de la gauche. Mais il faudra que le PS s'affirme comme une vraie force de gauche, en se prononçant clairement sur les retraites, par exemple... »

« Un syndicalisme de lutte des classes »

on dit le syndicalisme globalement en perte de vitesse. Quels défis attendent vos successeurs ?

« Au Havre, le nombre d'adhérents de la CGT a très peu varié en dix ans, malgré les fermetures d'usines, les délocalisations ! Nous comptons près de 8000 syndiqués aujourd'hui, à travers 130 sections. Il faudra continuer à être présent partout, former un maximum de militants à mobiliser les salariés. Car y aura d'autres batailles à

venir : celle des retraites, notamment, va forcément revenir. »

La CGT ne souffre donc pas de son image de syndicalistes « à l'ancienne » ?

« C'est l'image que l'on essaie de nous donner. Mais nous sommes une organisation moderne et dynamique. Dans les petites entreprises, ce sont surtout des jeunes et des femmes qui adhèrent. Et oui, je revendique un syndicalisme de lutte des classes ! De plus en plus, même : il n'y a que comme ça que nous pourrons faire avancer nos revendications. »

Propos recueillis par Thomas Dubois

(Havre Libre)

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