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Mardi 8 Novembre 2011:

 

Éditorial

L'imposture

Par Jean-Paul Piérot

Le plan d'austérité présenté hier par François Fillon constitue une nouvelle étape dans la démolition sociale à l'oeuvre depuis le début de la présidence Sarkozy. On a beau, depuis 2007, être habitué aux mystifications, aux présentations trompeuses, à la théâtralisation des annonces, on reste pantois devant l'énormité de la manoeuvre à laquelle se livre un pouvoir complètement discrédité.

Faute de pouvoir désormais convaincre la partie de l'électorat populaire qui avait fait basculer l'élection présidentielle en sa faveur sur la base d'une tromperie - « je suis le candidat du pouvoir d'achat », « travailler plus pour gagner plus » -, Nicolas Sarkozy croit avoir trouvé le mistigri de la peur pour échapper à la sanction annoncée des urnes. La crise athénienne est agitée comme une menace contre le mouvement social. « Le mot de faillite n'est pas abstrait » a lancé à dessein le premier ministre, un peu imprudemment du reste, car courant le risque qu'une telle perspective ne soit imputée, par tout citoyen quelque peu averti, à l'équipe qui préside au destin de notre pays depuis près de cinq ans.

La dette est insupportable ? Les déficits inacceptables ? Qui d'autres sont responsables des recettes insuffisantes de l'État que ceux qui sous la conduite de Nicolas Sarkozy ont multiplié les cadeaux fiscaux aux plus riches et on fait payer leurs largesses au reste de la société par des coupes dans les dépenses sociales.

Cette politique de gribouille a largement contribué à plomber la croissance. Au nom de quoi François Fillon préconise « l'accélération de nos efforts »... Cette fuite en avant entraîne la France dans une spirale funeste. Les plans d'austérité étouffent la consommation et appellent d'autres plans d'austérité. Toutes proportions gardées, c'est un scénario à la grecque que le gouvernement est en train de nous écrire, tout en présentant Nicole Sarkozy comme étant l'homme qui veut « protéger les Français des graves difficultés que connaissent plusieurs pays européens », prétend François Fillon. Quelle imposture ! L'aggravation de la réforme des retraites va retarder le départ des salariés nés entre 1952 et 1956 au prix d'un chômage accru pour les jeunes entrant dans le marché du travail. La revalorisation des prestations en fonction du taux de croissance et non plus du coût de la vie se traduit par une réduction de moitié des allocations familiales pour 2012. La hausse du taux réduit de la TVA de 5,5 % à 7 % frappera au même niveau le milliardaire et le salarié modeste. La désindexation de l'impôt sur le revenu se traduira par une hausse générale de la pression fiscale. Les nouvelles réductions des dépenses publiques et de l'assurance maladie seront avant tout ressenties par les familles modestes. En face, le contre-feu « exceptionnel » de la majoration de l'impôt sur les grandes entreprises et la hausse du prélèvement forfaitaire sur les dividendes font figures d'amuse-gueule quand le monde du travail paie l'addition du banquet.

Il faut reconnaître à ce gouvernement sa constance. François Fillon a glissé une phrase lourde de sens dans son discours : « Il faut refonder notre modèle de croissance qui est devenu insoutenable car depuis trop longtemps tiré par la consommation soutenue par les transferts sociaux »... L'aveu est de taille. Il y a presque cinq ans, un dirigeant du patronat, Denis Kessler salué dans l'élection de Nicolas Sarkozy l'opportunité d'en finir avec le programme du Conseil national de la Résistance... Sur ce point, Nicolas Sarkozy n'a pas déçu cette droite-là.

(source l'Humanité)

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