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Lundi 24 Octobre 2011:
Éditorial Un sommet de crise, dans la crise Par Jean-Paul Piérot Les dirigeants européens jouent les prolongations sans savoir sur quoi va déboucher leur sommet de crise.C'est un véritable marathon qui a débuté par une rencontre entre le président français et la chancelière allemande et qui devrait finalement se conclure mercredi, et non dimanche comme initialement prévu. La crise de la dette n'en finit pas d'aiguiser les tensions entre gouvernements selon qu'ils se situent ou non dans la zone euro, selon qu'ils sont plus ou moins affectés par les difficultés économiques et financières. Elle alimente les désaccords entre Paris et Berlin sur le rôle qu'il convient de faire jouer au fonds de stabilité européen. La tragédie grecque s'affirme comme le révélateur d'un vice de fonctionnement majeur dans la construction européenne telle qu'elle est actuellement conduite. Ce vice de fonctionnement tient à l'incapacité que les traités européens ont imposée à la Banque centrale d'aider directement les États. Cette question avait été au centre des critiques formulées par une partie de la gauche contre le projet de constitution européenne, en 2005, puis contre le traité de Lisbonne, qui fut présenté par tous les eurolibéraux de la droite ou de la social-démocratie comme la condition sine qua non pour aller de l'avant. Ceux qui redoutaient que le traité de Lisbonne ne mène l'Europe dans le mur étaient alors stigmatisés du sceau de l'infamie, marqués au fer rouge de l'accusation d'antieuropéens. Or ceux-là mêmes qui ont imposé aux peuples d'Europe un texte qu'il leur était interdit de contester ou même d'amender proposent ni plus ni moins de changer le traité. Ce qui équivaut à reconnaître qu'en piétinant le vote des Français, des Néerlandais puis des Irlandais, les dirigeants de l'UE ont conduit l'Europe à la crise la plus grave de son histoire institutionnelle. Nicolas Sarkozy a joué un rôle de premier plan dans le recyclage du traité constitutionnel sous la forme du « traité simplifié », qui devint le traité de Lisbonne après sa signature dans la capitale portugaise. Cet épisode du début du quinquennat est maintenant passé sous silence dans le bilan du président de la République. Le traité qui focalise tous les mécontentements pourrait tout aussi bien s'appeler le traité Sarkozy. Après plusieurs mois de crise aiguë, devant la résistance du peuple grec et le risque d'un emballement du désastre résultant d'un effet domino, les dirigeants européens en viennent à préconiser l'abandon de 50 % de la dette grecque aux frais des banques, lesquelles devront être recapitalisées, il faudra attendre mercredi pour savoir si les désaccords subsistant, notamment entre Paris et Berlin, seront surmontés et quel sort sera réservé aux compétences du fonds européen, qu'Angela Merkel ne veut pas étendre à un rôle de banque d'emprunt pour les États. Pari va-t-il s'incliner devant le diktat de Berlin ? Il y a tout lieu de le craindre. (source l'Humanité)
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