> Presse —Pour 100% des grévistes d'Ipsos, 24 euros c'est rien ! |
Jeudi 13 Octobre 2011:
Pour 100 % des grévistes d'Ipsos, 24 euros c'est rien ! À l'institut de sondages, les enquêteurs vacataires ont arrêté le travail depuis jeudi dernier. Indignés par le montant dérisoire de la prime de partage des profits, au moment où l'entreprise distribue 20 millions d'euros à ses actionnaires. Est-ce que vous estimez que le président de la République, le gouvernement et la direction de votre entreprise se paient un peu, pas du tout, beaucoup, passionnément, à la folie, votre tête ? Dans la vaste enquête à ciel ouvert, lancée depuis quelques jours au sein même de l'institut de sondages Ipsos, les résultats sont sans appel : 100 % des grévistes – la quasi-totalité des 600 enquêteurs vacataires et des dizaines CDD et CDI qui débrayent quelques heures par jour à leurs côtés – sont ulcérés. « C'est du frottage de gueule », comme le lâche l'un d'entre eux. Au titre de la « prime de partage des profits », ce mécanisme mis en place par Nicolas Sarkozy afin d'obliger les entreprises à offrir une carotte exonérée de cotisations sociales à leurs salariés quand elles versent des dividendes en progression à leurs actionnaires, la direction générale d'Ipsos a, dans un premier temps, proposé de donner 6 euros de « prime Sarko » à ses salariés. Au cours de la négociation, elle a ensuite revu sa proposition à la hausse, en passant à 24 euros par salarié. Salaires et primes rognés Alors qu'au moment des débats sur cette prime exceptionnelle, le gouvernement avait évoqué un montant de 1000 euros par salarié, l'élan de générosité de la direction d'Ipsos a visiblement été reçu par les enquêteurs de l'institut de sondages comme un bras d'honneur : depuis jeudi dernier, sur les sites de Gentilly (Val-de-Marne), de Bordeaux (Gironde) et de Plérin (Côtes-d'Armor), la grève est presque totale parmi eux. D'après la CGT, les actionnaires d'Ipsos se sont partagé 20 millions d'euros sous la forme de dividendes en 2011, un chiffre en augmentation de 17 % par rapport à l'an dernier. Le syndicat ajoute que 263 000 actions gratuites ont été distribuées en 2010 et que plus de 1,5 million d'euros ont servi à couvrir les frais liés à des suppressions d'emplois. « Alors que le chômage atteint des niveaux record, la direction d'Ipsos licencie et rogne sur les salaires et les primes pour continuer à servir les actionnaires », dénonce la CGT. De son côté, la direction générale d'Ipsos réfute ce qu'elle considère comme une « interprétation abusive » : « La direction n'a jamais proposé de prime de 24 euros, assure Yannick Carriou, directeur général d'Ipsos France. Lors des négociations, nous avons proposé d'augmenter de 30 000 euros l'enveloppe allouée à la participation. Les syndicats ont divisé cette somme par 1200 salariés pour obtenir 24 euros par tête. » Une détermination inédite Sur le site de production Ipsos de Bordeaux, rien n'y fait : la colère est très vive, le mouvement profond, et la détermination inédite. Hier matin, dans la manifestation « pour le partage des richesses », les grévistes de l'institut de sondages ont compté parmi les stars du défilé. « La direction essaie de faire un montage mélangeant la prime Sarko et la participation pour paraître moins ridicule, dénonce Philippe Pinaud, porte-parole des grévistes bordelais. Mais cela ne trompe personne. La situation est très simple : à Ipsos, mieux vaut être actionnaire que salarié ! L'entreprise a bien traversé la crise et, depuis le début de l'année, l'activité est énorme, on n'arrête pas de mettre en avant nos qualités, nos compétences, puis voilà ce qu'on obtient comme résultat, cette prime ridicule ! Nous n'en pouvons plus de ce manque de considération, de ce mépris... » Délégué syndical CFDT, Alain Cocouch avertit, de son côté : « Ce sont les salariés qui ont lancé le mouvement et les syndicats les suivent. Notre base de négociation, c'est 1000 euros, la somme évoquée par le gouvernement au printemps... Mais nous ne sommes pas des jusqu'au-boutistes : entre 24 et 1000 euros, il y a de la marge pour négocier, même si la direction, qui ne goûte guère la médiatisation, joue encore le blocage... » Thomas Lemahieu (source l'Humanité)
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