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Dimanche 2 Octobre 2011:

 

Éditorial

La danse macabre

Par Claude Cabanes

Quelle java ! Cette semaine, dans les colonnes des journaux, les hommes du pouvoir et leurs amis sont bruyamment invités à entrer dans la danse : la dernière, la danse du crépuscule ! On avait déjà lu, depuis les élections sénatoriales de dimanche dernier qui ont bousculé la donne, et martyrisé l'UMP, de bien savoureuses déclarations. Par exemple, du côté de Matignon où se tient François Fillon, on a pu entendre : « C'est un vote qui veut dire : dégagez ! » Diable ! C'est la panique à bord ! Un député du parti au pouvoir particulièrement lucide – mais si, mais si, camarades, il y en a qui aperçoivent la pente fatale... - ce député, donc, a eu ce commentaire : « Quand j'ai entendu parler le premier ministre de la retraite à soixante-sept ans, je me suis dit : il veut la peau de Sarkozy ? » Bien vu. L'intéressé lui-même, le président donc, aurait confié à un visiteur : « De toute façon, qui tu vois d'autre que moi, comme candidat ? » Évidemment, on ne va pas lui suggérer David Douillet... ou Gérard Larcher, qui va perdre la présidence du Sénat. Quand on en est là, c'est qu'il y a le feu au lac.

Exposées depuis hier dans les kiosques et les maisons de la presse, les dernières unes des magazines les plus connus sonnent comme le glas pour Nicolas Sarkozy et ses régiments. Le Point renifle « Un parfum de fin de règne », qu'il résume de trois mots : « Affaires, crise, charivari. » L'Express observe avec une sorte de gourmandise « la chute du clan », avec des portraits de messieurs Hortefeux et Guéant de part et d'autre de celui de Nicolas Sarkozy. On a connu autrefois plus d'indulgence dans les colonnes de cet hebdomadaire pour ceux qui gouvernent : les vents tournent, quoi... !

Le Nouvel Observateur s'est glissé dans « les coulisses d'une fin de règne » et, page 46, se pose la question du tue : « Sarkozy a-t-il déjà perdu ? » Avec sagesse, son éditorialiste répond que l'hôte de l'Élysée « ne peut plus gagner l'élection présidentielle, mais la gauche peut encore la perdre ». Exact. Cela désormais dépend d'elle et seulement d'elle. Donc, de nous. Il ne suffit pas que l'adversaire soit à terre...

Et cette revue de presse serait bien incomplète si elle ignorait la délicate confidence et l'analyse si pénétrante de Carla Bruni-Sarkozy, dans les jardins de l'Élysée : « Nicolas connaît toutes les appellations latines des fleurs et m'explique tout sur les tulipes et les roses... Et puis, comparée aux conservateurs américains, l'UMP est presque un parti de démocrates de gauche. » Mon Dieu, les militants de ce parti vont en tomber en syncope... On espère que madame Ockrent, qui a réalisé cet entretien pour la BBC de Londres, en sera récompensée...

Et puis, dans le Figaro de ce 20 septembre, page 20, le retour à la dure réalité de la bataille par ce titre sur quatre colonnes qui a le mérite d'une obscène franchise : « Mieux vaut sauver les banques que la Grèce »... La bataille, notre bataille contre le capital, front contre front, et contre le pouvoir. Le pouvoir, comme le poisson, pourri par la tête.

Mais, après tout, la fin d'un monde n'est pas la fin du monde.

(source l'Humanité)

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