> Presse  L'école vent debout, le gouvernement s'en font

 

Dimanche 2 Octobre 2011:

 

L'école vent debout, le gouvernement s'en fout

Méprisant la mobilisation inédite dans l'éducation, il vient de livrer le détail des 14 000 suppressions de postes pour 2012.

Cause toujours ! En réponse à la journée de mobilisation de mardi, qui a vu public et privé défiler dans les rues, le gouvernement n'a rien trouvé de mieux que de détailler, mercredi soir, dans le cadre du projet de budget 2012, la répartition des 14 000 suppressions de postes prévues à la rentrée prochaine dans l'éducation nationale. On en sera alors à 80 000 sur l'ensemble du quinquennat. De quoi cajoler les marchés financiers et préserver la note de la France. Sûrement moins celle des élèves...

Personne n'est épargnée par ce jeu de massacre : 5700 postes d'enseignant disparaîtront dans les écoles primaires, 6550 dans les collèges et lycées publics, 400 au sein des personnels administratifs et 1350 dans l'enseignement privé sous contrat. Comment la Rue de Grenelle parviendra-t-elle à tenir ces chiffres ? « En utilisant les mêmes leviers que l'année dernière », précise le ministère. Une fois de plus, les inspecteurs d'académie miseront sur l'augmentation de la taille des classes, la suppression des postes de Rased spécialisés dans la lutte contre l'échec scolaire, la baisse de la scolarisation des moins de trois ans, la disparition des intervenants en langue étrangère, la suppression des profs remplaçants, le regroupement d'établissements, la « rationalisation » des personnels administratifs et, enfin, la suppression de postes en classes préparatoires et en BTS.

Magnifique ambition, alors que la France est déjà connue pour, entre autres titres de gloire, avoir l'un des taux d'encadrement prof-élèves les plus mauvais de l'OCDE ou encore pour être le pays corrigeant le moins la corrélation entre origine sociale et destin scolaire. Optimiste, le gouvernement pense sûrement pouvoir faire

pire !

Évidemment, les syndicats d'enseignants n'ont pas vraiment apprécié l'annonce, appelant, hier, les parlementaires à corriger d'urgence cette copie. « Le gouvernement ne tire aucune leçon du bilan de cette rentrée scolaire », s'agace la FSU, première fédération du monde éducatif. « Il persiste dans l'erreur », ajoute l'Unsa éducation. « Ne s'est-il donc rien passé ce 27 septembre dans la rue ? » renchérit le FEP-CFDT, premier syndicat du privé. Dans la rue, si. Mais, dans la tête du gouvernement, pas grand-chose. Ah si ! Le ministère de l'Éducation a joué à faire des additions, assurant sans rire que les postes supprimés entre 2008 et 2012 rapporteront « 70 milliards d'euros d'économies sur quarante ans ». Quel visionnaire ! Il a juste oublié de retrancher le coût social des 6 millions d'élèves (150 000 par an) qui auront décroché du système scolaire dans le même temps, faute d'une école digne de ce nom, ou encore le coût des milliers de postes d'enseignant qui se ferment au nez des jeunes, dont le taux de chômage culmine déjà à 25 %... Mais il est vrai que l'on ne peut pas avoir les yeux rivés sur le triple A et penser à tout.

Laurent Mouloud

(source l'Humanité du vendredi 2 octobre)

  haut de page