> Presse  Une barrière de 35 euros pour accéder à la justice

 

Mercredi 21 Septembre 2011:

 

Une barrière de 35 euros pour accéder à la justice

Un décret attendu début octobre doit instaurer une taxe de 35 euros à payer avant toute action en justice.

Objectif : bloquer la sortie du décret, puis faire abroger la loi. La mobilisation syndicale s'organise pour empêcher l'entrée en vigueur du timbre fiscal de 35 euros dont devrait s'acquitter toute personne pour saisir la justice. La semaine dernière, les syndicats de salariés CGT, CFDT, CGC, Unsa et Solidaires, ainsi que le Syndicat des avocats de France (SAF) et le Syndicat de la magistrature (SM), se sont réunis et mis d'accord sur une action commune contre cette atteinte à la gratuité de la justice. Il y a urgence car le décret d'application de la mesure, inscrite dans la loi de finances rectificative du 29 juillet, doit être publié sous peu, pour une entrée en vigueur le 1er octobre.

À l'origine de cette affaire, il y a la réforme de la garde à vue. En instituant le droit pour le gardé à vue de s'entretenir avec un avocat dès le début de la procédure, elle entraîne un surcoût pour l'État en paiement d'avocats commis d'office, estimé à 104 millions d'euros par an. Surcoût que le gouvernement a choisi de répercuter... sur les autres justiciables, par le biais d'une taxe de 35 euros que devrait payer toute personne saisissant un tribunal. Seraient exonérés les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle (aux revenus inférieurs à 929 euros par mois), et les procédures concernant le surendettement, le droit au séjour, ou relevant du juge des enfants, des libertés et des tutelles. Pour 2,5 millions de procédures par an, la taxe rapporterait 87,5 millions d'euros. C'est ce que le gouvernement appelle la « solidarité entre justiciables usagers du service public ».

« Scandaleux », rétorque Pascal Taelmann, du SAF, qui rappelle qu'une autre taxe de 150 euros va entrer en vigueur pour certaines procédures en appel. « Cette mesure remet en cause le principe de la gratuité de l'accès à la justice, consacré par le législateur il y a plusieurs décennies », déclare Patrick Henriot, secrétaire national du Syndicat de la magistrature, qui dénonce le « caractère inégalitaire » de cette taxe, qui va frapper plus durement les demandeurs modestes, salariés, consommateurs. « On commence avec 35 euros, mais une fois que la porte est ouverte, le montant peut être augmenté », s'inquiète-t-il

« Aux prud'hommes, 99 % des demandes sont faites par les salariés, pour récupérer une attestation Assedic pour s'inscrire au chômage, pour toucher un impayé de salaire, pour contester un licenciement. Ces gens-là devront payer, même pour les procédures urgentes en référé », s'insurge Bernard Augier, qui représente la CGT au conseil supérieur de la prud'homie. « Les 35 euros vont dissuader une partie des salariés d'aller en justice. Est-ce comme ça que le gouvernement veut régler le manque de moyens, de locaux, de personnel de greffe dans les tribunaux ? »

Fanny Doumayrou

(source l'Humanité)

  haut de page