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Dimanche 11 Septembre 2011:

 

Un contrat sur la tête des 35 heures

Par Gérard Filoche, inspecteur du travail

L'Élysée aurait chargé Bruno Le Maire du projet sarkozyste 2012. Ce dernier soutient Jean-François Copé non seulement contre les 35 heures, mais contre toute durée légale du travail. UMP propose une durée du travail fluctuant par accords conventionnels – de branches ou d'entreprises – plutôt que par la loi

« dans un délai de 3 ans maximum ». Ainsi, comme le veut Laurence Parisot,

l'« adaptabilité » l'emporterait.

On aurait là, d'un coup, 170 ans de retour en arrière. Ils détruiraient, s'ils parvenaient à faire réélire le pire président antisocial de toute la Ve république, tout ce qui reste de la base du droit du travail. Parce que toute l'histoire du Code du travail, depuis 1840, c'est l'histoire de la baisse de la durée légale du travail ! Le rapport du Dr Villermé étudiant « l'état physique et mental des ouvriers dans les fabriques » observait que les hommes, femmes et enfants mourraient au travail avec des journées de 15,16, 17 heures. La première loi éphémère fixa une limite à 11 heures par jour pour les enfants. Il fallut 80 ans de luttes pour arriver à la journée de 10 heures partout, pour tous. Il fallut 70 ans pour passer de la semaine de 40 heures en 1936 à 39 heures en 1982, et à 35 heures en 2002. Et le SMIC et les salaires négociés en dépendent ! On a prouvé qu'on pouvait à la fois produire plus, créer plus d'emplois, gagner plus et travailler moins longtemps... depuis 170 ans !

Pourquoi est-ce que cela a été fait par la loi ? Parce que, sinon, les patrons n'auraient jamais accepté. Parce que le but n'était justement pas « d'adapter » les durées du travail aux branches et entreprises, mais au contraire d'imposer que branches et entreprises s'adaptent aux besoins du corps et de la vie humaine. Les besoins humains face au travail sont les mêmes à Peugeot Sochaux ou dans le petit garage du coin, dans les grands bureaux ou dans le petit commerce, chacun a besoin de protéger sa santé face au travail qui use et tue, et besoin de temps libre pour vivre. Si l'on revient « au contrat qui l'emporte sur la loi » et à la durée du travail « à la carte », ce sera le retour de la subordination des humains aux exigences de la productivité.

8 heures légales, 10 heures maximales par jour, 35 heures hebdomadaires légales (vers 32 heures), 48 heures maximales (vers 44 heures !),1600 heures annuelles et droit réel à la retraite à 60 ans : il n'est pas question que ce soient des « repères » fluctuants et hasardeux soumis aux circonstances et aux rapports de forces, mais cela doit rester des garanties fondamentales d'ordre public social.

(source L'Humanité Dimanche)

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