> Presse —C'était il y a un siècle, il inspectait le travail... |
Dimanche 4 Septembre 2011:
Par Gérard Filoche, inspecteur du travail C'était il y a un siècle, il inspectait le travail... « Quand un patron trouve un bon moyen d'enfreindre les lois sur la durée du travail ou sur l'âge d'admission des enfants, cela le rend content. Sa fille va voir Guignol rosser le commissaire. Lui, patron, veut rosser l'inspecteur du travail. Il établit, contre la loi, sa coutume qui est qu'il n'y a pas de loi respectable que celle qui lui profite. Contre ce qui attente à la propriété, son indignation est prête, ou son chien, voir son fusil. Il faudrait que les juges ne soient pas prêts. Ils le sont. (…) Il n'admettra pas être citoyen indigne pour avoir violé les lois sur le travail. Il est braconnier. S'il gagne, il rit et il s'en vante. Dans son esprit tient un énorme respect pour les lois heureuses à son bénéfice et un égal dédain de celles qui le limitent. Surtout, il a l'horreur de l'illégalité. Un des signes d'infériorité de ses ouvriers est pour lui leur promptitude à sortir de la légalité, des convenances, du respect de sa propriété. Que M. le préfet de son département tarde à lui envoyer, en temps de grève, beaucoup de gendarmes résolus et de soldats résignés, au premier caillou dans ses carreaux, il dira : "Beau pays ! Elle y est propre, l'application de la loi." Dans ce cas-là, il exige " le maintien de la légalité". Il ne consent pas à "entrer en pourparlers avec les grévistes tant qu'ils ne seront pas venus au respect de la légalité". Il faudrait souhaiter de la part de M. le préfet, cette expérience est ce discours : "M. le patron, vos ouvriers sont en grève parce que vous avez enfreint les lois ouvrières. Ils brisent vos vitres, ce qui est un attentat aux lois propriétaires. Eux et vous paraissez avoir, le gendarme ôté, une même promptitude à vous passer des lois. Vous choisissez lesquelles passer dessous. Je me rends à vos goûts. Je vais mettre mes utiles soldats et mes précieux gendarmes, non pas entre vos deux ordres d'illégalité, mais autour de votre illégalité et je vous regarderai faire. Quand vous en aurez assez, je vous le direz, la loi viendra." M. le patron peut être alors deviendrait citoyen, s'étant aperçu qu'en violant les lois, les lois sur le travail, il est un bandit. » Voilà : c'était un extrait d'un des nombreux articles d'un inspecteur du travail, Pierre Hamp, qui, entre 1906 et 1912, écrivait, dans « l'Humanité » de Jean Jaurès, les réflexions que lui inspiraient ses contrôles dans les entreprises. (source L'Humanité Dimanche)
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