> Presse —Il faut que les salariés se fâchent... mais sont-ils... |
Lundi 29 Août 2011:
Il faut que les salariés se fâchent... mais sont-ils prêts à le faire ? L'intersyndicale CFDT, CGT, FSU, Solidaires et UNSA devait se réunir le 24 août pour réagir aux nouvelles mesures d'austérité que le gouvernement devait annoncer le même jour. La CGT souhaite une journée d'action nationale et interprofessionnelle dès la rentrée, mais n'a pas encore pu convaincre ses partenaires de s'y rallier. Dans les entreprises, comment les militants syndicaux apprécient-ils l'état d'esprit des salariés ? L'austérité ? Non merci ! « La solution, pour sortir de cette crise qui n'en finit pas, c'est de réformer la fiscalité et d'augmenter les salaires, les retraites, les minima sociaux pour relancer la consommation » affirment Hervé Ossant, secrétaire de l'UD CGT 93 (Seine-Saint-Denis). Hervé Laplatine, délégué syndical central CFDT d'Auchan, insiste sur la régulation financière « pour que cessent les délires déprédateurs » : « Dès le début de la crise, en 2008, les gouvernements auraient dû reprendre la main, socialiser les banques. Pour les pousser à agir, il faut que les salariés se fâchent ! » Mais sont-ils prêts à le faire ? Hervé Ossant se veut optimiste. Dans son département, les luttes ont été nombreuses ces derniers mois pour arracher des hausses de salaires. « Un sondage publié dans « l'HD » fin avril (1), soulignait que « 80 % des Français veulent que les syndicats se mobilisent avant 2012 », Hervé Lassalle, délégué syndical central CFDT d'Alcatel-Lucent, sent pourtant les salariés hésitants : « le chômage des jeunes, la crise boursière qui redémarre... on a l'impression qu'on n'en sort jamais. Les résultats de la boîte se redressent. Pourtant, l'action subit en Bourse des mouvements spéculatifs qui fragilisent l'entreprise. Les salariés réalisent que l'on est tributaires des marchés financiers. Mais pas sûr qu'ils se sentent capables de mener un combat qui puisse avoir une influence. » Dans les hôpitaux, la RGPP fait des ravages. Depuis 3 ans, les établissements de l'Assistance publique- Hôpitaux de Paris perdent 1000 emplois chaque année. Tout le monde est touché : soignants, personnels technique et administratif. « Les heures supplémentaires se multiplient, du fait du manque d'effectifs et parce que beaucoup ont besoin d'argent, constate Graziella Raso, de la CGT AP-HP. Il y a des prises de conscience des dégâts de l'austérité. Il y a aussi des réactions, des fuites ; certains agents quittent l'hôpital. » Dans les banques de détail, les salaires cristallisent aussi le mécontentement. « Beaucoup de salariés ne sont même pas à 1500 euros net en fin de carrière », rappelle Philippe Kernivinen, délégué syndical central FO de LCL (ex-Crédit lyonnais, groupe Crédit agricole). Le sentiment d'injustice est fort. « LCL avait un système de retraite à prestations définies réservé aux cadres. La loi oblige maintenant à l'étendre à l'ensemble des salariés. Mais pour les 22 000 salariés, l'abondement de l'entreprise sera de quelques centaines d'euros par an, alors que pour 300 cadres dirigeants s'ajoutera un système de retraite chapeau d'un tout autre niveau ! Malgré tout, c'est l'inquiétude qui domine, la peur des plans de réduction d'effectifs face à tout ce que l'on dit des banques : leur manque de fonds propres, les cours qui dégringolent en Bourse. » En région lyonnaise, l'union locale CGT et la fédération CGT chimie se mobilisent pour sauver l'usine Veninov à Vénissieux, mise en liquidation judiciaire. « Pour populariser cette bagarre, on distribue des tracts dans les zones industrielles, sur les marchés, dans les quartiers populaires. L'accueil est très chaleureux », explique Jacques lacaille (fédération CGT chimie). Est-ce un signe ? « Dans le privé, on n'a toujours pas récupéré de la bagarre sur les retraites que l'on n'a pas réussi à gagner. Mais je suis convaincu que la politique menée par le patronat et le gouvernement amènera inévitablement des réactions du monde du travail, isolées peut-être au début mais qui se généraliseront car nous n'avons pas le choix si nous ne voulons pas nous faire tondre la laine sur le dos. Ça se fera avec les organisations syndicales, si elles prennent leurs responsabilités devant les travailleurs avant leurs intérêts de boutiques, ce qui n'a pas toujours été le cas. Sinon... Mais je suis convaincu que les militants dans les entreprises et les services seront au rendez-vous de ces luttes. » Dominique Sicot (1) Sondage Harris Interactive pour « l'Humanité Dimanche » publiée dans le n° 259 du 28 avril 2011. (source L'Humanité Dimanche)
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