Jeudi 25 Août 2011:
Points de vue
« Ce qui manque c'est la volonté et le courage »
Daniel Paul, député (PCF) Seine-Maritime.
« La relance de la croissance et de l'emploi est un des éléments majeurs pour sortir de la crise. Et l'argent existe en France. Ce qui manque, c'est la volonté et le courage politique. Remarque qui s'adresse aussi à la gauche, et particulièrement au PS. Depuis 2007, Nicolas Sarkozy a épargné les riches. Ce qui a entraîné une réduction drastique des ressources de l'État. La Cours des comptes montre que les deux tiers des déficits sont dus à la politique de la droite, soit 90 milliards d'euros. La défiscalisation des heures supplémentaires, c'est moins 6 milliards d'euros par an et des conséquences négatives pour l'emploi ; l'allégement de l'impôt sur la fortune coûte 2 milliards à l'État ; la fraude sur les cotisations sociales des entreprises ; le coût des exonérations de cotisations patronales pour la Sécurité sociale, que l'État compense partiellement.
Voilà qui représente autant d'argent qui permettrait de trouver les 10 milliards que le gouvernement entend
« économiser » au budget 2012 et bien au-delà, renverser la vapeur pour relancer la croissance et emploi. Nous voulons remettre à plat tous ces dispositifs et nous faisons quatre propositions : refuser la « règle d'or » ; créer un pôle public financier afin d'aider les collectivités et les grands investissements publics à se soustraire de la pression des marchés ; adapter les aides et exonérations des entreprises à des objectifs contractuels en matière d'emploi, de formation et de relocalisation ; réformer la fiscalité pour que le capital soit imposé au même niveau que les revenus du travail. Enfin, au plan européen, nous voulons que la France pèse pour mettre fin à l'indépendance de la Banque centrale européenne, lutte contre la concurrence libérale et pour la coopération en Europe, et agisse enfin pour la renégociation des traités qui ont conduit à l'impasse actuelle. »
Propos recueillis par Max Staat
« Imposer les riches jusqu'à 80 % »
Alexandre Derigny, secrétaire de la fédération des finances CGT.
« Aujourd'hui, le système fiscal est profondément injuste, inefficace et contraire à la Déclaration universelle des droits de l'homme, selon laquelle un citoyen contribue à la hauteur de ses revenus. Dans le système actuel, les Français les plus riches paient moins d'impôt que les autres. 90 % de leurs revenus sont tirés des revenus du capital qui, à 80 %, échappent à l'impôt sur le revenu. Warren Buffet, Liliane Bettencourt ont lancé des appels moraux afin que les plus riches soient mis à contribution. Je me souviens d'entretiens avec les ministres des Finances et du Budget où l'on nous rigolait au nez lorsque nous évoquions la question. Rompre avec ces privilèges, cela signifie prendre des mesures drastiques et non des demi-mesures. Or, celles qui vont être annoncées apparaissent particulièrement cosmétiques et électoraliste pour calmer une opinion publique en colère. Bien sûr qu'il faut revenir sur les niches fiscales, parce qu'elles sont profondément injustes, les plus riches ayant la capacité d'investir dans des systèmes afin de bénéficier de ces niches. Mais un simple coup de rabot est loin d'être suffisant : depuis 2004, elles ont augmenté de 142 %. Ensuite, il faut absolument réformer l'impôt sur le revenu. Au fil du temps, nous sommes passés d'un taux marginal de la tranche la plus élevée de 65 % à
41 %. Taxer les revenus extravagants, cela n'a pas de sens : il faut rendre la progressivité à l'impôt en ajoutant de nouvelles tranches jusqu'à 80 %. Et les revenus du capital doivent être taxés de la même façon que ceux du travail. De l'argent, il y en a. Mais il faut également dénoncer ce dogme des réductions drastiques de dépenses. Car ce n'est pas en réduisant les capacités des premiers investisseurs en France, que sont l'État et les collectivités, que l'on pourra relancer l'économie et augmenter les recettes fiscales. »
Propos recueillis par C. M.
(source l'Humanité du mercredi 24 août)