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Mardi 16 Août 2011:

 

L'éditorial de Michel Lepinay

Vite et fort !

Sommes-nous « au début d'une tempête nouvelle », comme l'affirme Robert Zoellick, le président de la Banque mondiale ? Ou alors vivons-nous simplement le énième avatar d'une crise débutée en 2007, et qui ébranle tous les fondements de l'équilibre économique mondial ? On peut en tout cas trouver un fil d'Ariane entre les événements qui se succèdent depuis lors : l'inefficacité des mesures correctives. Toujours trop peu, toujours trop tard ! On se souvient du début, lorsque les États venaient de s'endetter un peu plus. Pour sauver leurs banques, au bord de la faillite à cause des risques inconsidérés qu'elles avaient pris, et relancer leurs économies en récession. Au G20, sous l'impulsion d'un Nicolas Sarkozy volontariste, on disait « plus jamais ça », et l'on parlait d'une « Refondation du capitalisme ». De longs mois plus tard, un plan était proposé. Pour l'essentiel, une limitation, modérée, des bonus des banques, quelques étais pour consolider leurs bilans, et un contrôle, mesuré, des paradis fiscaux. Les spéculateurs pouvaient continuer à jouer de plus belle pour compenser la limitation de leurs bonus. En changeant de terrain de jeu. Le nouveau s'appelle « dette souveraine des États ». Et il y a de quoi faire. Tous les États occidentaux, ou à peu près, sont surendettés. On peut donc gagner beaucoup d'argent en mettant en cause leur capacité de rembourser. Alors on joue. Avec dans le rôle de l'arbitre, des agences de notation, incontrôlées, qui peuvent décider à leur gré de s'attaquer à tel ou tel pays. Et une seule règle : tout est permis. On peut vendre des titres que l'on ne possède pas, pour les faire baisser, et les acheter ensuite moins cher qu'on ne les a vendus par avance... Spéculer sur la fragilité de tel ou tel gouvernement, sur les manifestations dans les rues de Madrid, ou la baisse du pouvoir d'achat des retraités grecs... Et là encore, les pouvoirs publics ont toujours un temps de retard sur les assaillants. Quand on décide d'interdire, provisoirement, la vente à découvert, qui permet de vendre ce que l'on ne possède pas, les bourses ont déjà dévissé de 30 %. Quand on finit par trouver un accord pour aider la Grèce, c'est après des mois de tergiversations, et de discussions avortées, et l'on annonce aussitôt qu'il n'est pas question de défendre l'Italie ou l'Espagne s'ils sont attaqués... Toujours trop peu, toujours trop tard ! Les spéculateurs ont la partie belle. Aujourd'hui Angéla Merkel et Nicolas Sarkozy se retrouvent pour tenter une énième fois de trouver une réponse à la crise. Ils vont devoir démontrer enfin leur capacité à faire valoir les intérêts publics face à ceux des spéculateurs. La volonté de leurs pays de se hisser d'un cran, non pas sur l'échelle des agences de notation, mais sur celle de la réalisation de notre grand dessein commun européen. En oubliant leurs frilosités politiciennes et les intérêts de leurs économies nationales, pour prendre la mesure du défi. Très vite et très fort !

(source Havre Libre)

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