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Mardi 9 Août 2011:

 

Éditorial

allô Sirius ? Ici la terre

Par Michel Guilloux

La chute des cours permet une rave innovation chez nombre de commentateurs, jusque dans les rangs de la gauche bien pensante : la redécouverte de l'eau tiède. Le

« politique » n'aurait plus de pouvoir ; « l'économie » le détiendrait pleinement. Les États seraient, soudain, démunis face à la toute-puissance de « marchés » eux-mêmes soumis à la folle mécanique d'obscures agences de notation, ayant sans doute leur siège social sur Sirius. Sans revenir au XIXe siècle, auquel celui-ci finit par ressembler furieusement par maints aspects, dont l'esprit versaillais n'est pas le moindre, revenons au 17 août 2007. Ce jour-là, l'Humanité titrait en une : « Le Krach », et précisait : « Les banques centrales et les gouvernements ne peuvent maîtriser les conséquences de la course à la spéculation qu'ils ont soutenue. La débâcle menace désormais la croissance et l'emploi. » Certains se gaussèrent de notre analyse de l'actualité, au début de ce qui allait devenir « la crise des subprimes », acte fondateur de la crise de système actuelle en passe de prendre l'allure d'un recul de civilisation.

Qui a pu croire un seul instant, dans ces conditions, que le « politique » et « l'État », incarné par un pouvoir consanguin du Medef, allaient mettre en acte les belles résolutions sur la lutte contre « les voyous de la finance » vitupérés sur mesure pour le 20 heures ? Alors, impuissance ou complicité de crime ? S'agissant de l'Europe, les mêmes distributeurs automatiques de bons points pointent une Allemagne qui « traînerait des

pieds », Angela Merkel continuant ses randonnées bavaroises tandis que le monde irait à la ruine. Mais si Berlin se fait si discret ces jours-ci, c'est que, pour les milieux d'affaires outre-rhénans, la situation est réglée depuis bien longtemps. Du social-démocrate Schröder et ses « jobs » à 1 euro, jusqu'à l'actuelle chancelière qui s'est servie de ces choix comme marchepied, l'essentiel des sacrifices sociaux et salariaux à imposer à leur peuple est accompli. Aux autres, de la Grèce au Portugal en passant par l'Italie, de faire de même et évite.

S'agissant de la France, aujourd'hui comme hier, en 2007, si Nicolas Sarkozy a endossé un costume trois pièces de sauveur, c'est de celui des « marchés » et de leur sacro-sainte soif de rentabilité financière. Cette dernière étouffe croissance, emploi, salaires ? La dette publique a explosé pour compenser les pertes des affairistes ? Eh bien ajustons plus étroit le nœud coulant. C'est là tout le sens du pacte Sarkozy-Merkel, « le pacte des rapaces » appuyé au niveau européen. Que seule l'Humanité donne à connaître : imposer une austérité sans précédent et museler les peuples qui protesteraient. Ce à quoi applaudit Standard & Poor's, celle qui a

« dégradé » la note des États-Unis : la France est un bon élève, car casser les retraites est « une mesure intelligente »...La voie est tracée des sacrifices que ce pouvoir politique agissant de concert avec les puissances économiques et à leur service entend asséner en autant de coups de massue antisociaux. Et oui, cela signifie de graves atteintes à la démocratie en perspective, telle la mise sous tutelle des Parlements comme des budgets nationaux. Alors, que faire ? Peut-être agir pour que le plus grand nombre, dans le peuple, se saisisse de ces enjeux. Un par un, comme chacune de ces signatures recueillies ces jours-ci sur la pétition

« Contre la vie chère » que proposent les militants communistes, dans chaque quartier, entreprise, marché. Sur terre, pas sur Sirius.

(source l'Humanité)

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