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Samedi 6 Août 2011:

L'agrobusiness, source d'insécurité alimentaire

Les terres agricoles africaines sont l'objet de juteux profits d'exportation dans l'alimentaire et l'agrocarburant.

La famine dans la Corne de l'Afrique, conséquence de la seule sécheresse ? L'explication est un peu courte. Comme le reste du continent, cette région est devenue, ces dernières années, une sorte d'eldorado pour les multinationales de l'agrobusiness. Alléchés par la rentabilité potentielle des terres agricoles africaines, des investisseurs privés comme des États soucieux de garantir leur propre souveraineté alimentaire (Chine, pays du Golfe, Inde, Corée, Japon, etc.) se sont déjà accaparés des millions d'hectares de terres à Madagascar, au Mali, au Mozambique, au Soudan, au Ghana, en Éthiopie, au Kenya, etc. « En Éthiopie, l'État a accordé 3,6 millions d'hectares de terres dans l'ouest du pays pour des périodes de trente à cent ans contre un loyer annuel dérisoire de 4,3 euros par hectare », calcule l'Association française d'amitié et de solidarité avec les peuples d'Afrique (Afaspa)). Parmi les bénéficiaires de ces concessions, des producteurs d'agrocarburants, comme l'italien Fri-El Green Power, qui consacre 30 000 hectares à la culture de palmiers à huile sur les bords du lac Turkana, dans la vallée de l'Omo. L'accaparement des terres va souvent de pair avec une captation des ressources hydrauliques fatale à l'agriculture vivrière et aux communautés pastorales. Deux grands barrages sur l'Omo ont déjà été construits avec l'appui de l'Italie, un troisième est encore en chantier. Dans cette zone, certaines exploitations de palmiers à huile ou de canne à sucre gérées par des investisseurs étrangers peuvent atteindre plusieurs centaines de milliers d'hectares. Au Kenya aussi, des terres fertiles, comme celles du delta du fleuve Tana, sont ainsi bradées, dans la plus grande opacité, au mépris des communautés pastorales, pour être transformées en champs de canne ou en gigantesques fermes horticoles. En 2009, selon la Banque mondiale, 45 millions d'hectares de terres auraient ainsi été achetés ou loués à long terme par des investisseurs étrangers. Un phénomène qui s'est considérablement amplifié depuis la crise financière. Pour l'ONG Fian International, qui lutte pour le droit à l'alimentation, cet accaparement des terres agricoles porte une atteinte grave à

« l'autodétermination, la sécurité alimentaire et la souveraineté alimentaire des pays et des peuples » concernés.

Rosa Moussaoui

(source l'Humanité)

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