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Dimanche 31 Juillet 2011: Surendettement : Faut-il ficher tous les crédits ?
Frédéric Thafournel CSF(*) De Haute-Normandie « Un outil commercial » Pourquoi êtes-vous opposée au fichier ? Frédéric Thafournel : « On passe notre temps à être fiché. Un fichier des incidents de paiement existe déjà depuis un certain nombre d'années. Les commerçants et sociétés de crédits ont l'obligation d'aller le consulter et déjà ils ne le font pas ou alors ce n'est pas flagrant. D'autre part, ce « fichier positif » implique que quiconque voudra souscrire un crédit sera sur ce fichier, or cela ne veut rien dire. Vous pouvez très bien avoir un seul crédit et être dans la galère ou en avoir plusieurs et avoir tout à fait les moyens de les souscrire et de les régler. » Craignez-vous que ce ne soit qu'un coup d'épée dans l'eau ? « Si les sociétés de crédits demandaient systématiquement les justificatifs de crédits et de charges il y aurait moins de problèmes. Moi par exemple, on m'a demandé mon bulletin de salaire et un justificatif de domicile récemment pour l'achat d'une voiture. C'était après le passage de la loi Lagarde censée remettre les choses au carré et lutter contre le surendettement. La loi Lagarde prévoit que les vendeurs soient formés, ce qui suppose qu'avant ils ne l'étaient pas. Il leur faut peut-être du temps. Depuis le 1er mai de cette année, avec la loi Lagarde, les vendeurs qui proposent des achats à crédit ont l'obligation de consulter le fichier négatif, c'est-à-dire celui des incidents de paiement. Maintenant, on n'a pas assez de recul pour savoir si c'est un procédé bien suivi. Peut-être n'est-ce qu'une question de mise en route. » Le fichier positif ne représente-il pas tout de même un pas supplémentaire pour lutter contre le surendettement ? « Le fichier positif n'est pas une solution au surendettement. Car le surendettement provient surtout d'une insuffisance de ressources. Le fichier positif pourrait en revanche plutôt servir à des fins commerciales, pour refourguer des crédits à des gens qui n'en ont pas. On est pour la protection des consommateurs. Je m'occupe des personnes en situation de surendettement et on n'a qu'une envie, c'est que les personnes soient protégées. Mais ce n'est pas ce fichier positif qui résoudra le problème. » Quelles solutions entrevoyez-vous pour résoudre le problème du surendettement ? « Il faudrait que les salaires augmentent pour que chacun puisse assumer son quotidien. Dans les dossiers de surendettement que nous voyons on a surtout à la base un problème d'insuffisance des ressources. » Seriez-vous favorable à une police du crédit ? « Mais oui, parfaitement, il faudrait qu'il y ait des contrôles. » (*) CSF : Confédération Syndicale des Familles Jean-Louis Kiehl Président de la fédération Crésus « Éviter que la maison brûle ! » Pourquoi êtes-vous totalement favorable au fichier positif des crédits ? Jean-Louis Kiehl : « Je suis depuis 20 ans. L'an dernier je me suis déplacé 90 fois pour rencontrer Christine Lagarde, les ministres, les députés. Nous démontrons qu'il a une importance capitale non seulement pour éviter le surendettement mais aussi pour développer le crédit en France. J'ai rencontré le cabinet de Bercy mardi dernier. J'ai été étonné par la qualité de la proposition faite. » Développer le crédit et éviter le surendettement, mais comment ? « Tous les pays européens ont mis en place une centrale de crédit. Pour l'Allemagne cela date de 1928 par exemple. L'objectif c'est d'éviter les accumulations de crédits intenables. Aujourd'hui en France on se fonde sur la nature du contrat de travail du demandeur. Si vous avez un contrat en CDI, on accepte le crédit sans vérifier quoi que ce soit. En moyenne, dans les dossiers de surendettement, on est en France à 40 000 € contre 15 000 € en Belgique. En France, on vous demande si vous avez déjà un crédit et si vous répondez non on vous accorde le prêt. C'est un véritable cancer de la société française. » Pourquoi il existe déjà un fichier des incidents de paiement... « Malheureusement, en France, quand on se penche sur la question du surendettement des gens c'est qu'il est déjà trop tard, la maison a déjà brûlé. C'est ce que l'on appelle le dossier négatif. Il arrive au bout du deuxième impayé. Les gens continuent à payer et souscrire des crédits par-dessus les crédits pour rembourser avant de passer par le dossier de surendettement. Or, en France on a un dépôt de dossier de surendettement toutes les 3 minutes. » Certains accusent déjà les vendeurs de ne pas consulter le fichier des incidents de paiement avant d'octroyer un crédit, alors comment imaginer dans ces conditions que le fichier positif puisse être efficaces ? « Mais tout le monde le consulte le fichier des incidents de paiement, c'est une erreur que de laisser croire le contraire. Personne en France n'accorde de crédit sans cela. Ceux qui vous disent le contraire on tord. » Toutefois, ne craignez-vous pas des abus de la part des marchands qui pourraient utiliser le fichier positif à des fins commerciales, pour placer leurs crédits ? « Non, le registre ne sera consulté qu'au moment où une personne souscrira un crédit. En Belgique c'est la banque centrale, la banque royale, qui tient le fichier. Ce n'est que lorsqu'une personne souscrit un crédit qu'il y a consultation. Les banques pourraient être sanctionnées si elles en faisaient un instrument de marketing. » (source le havre libre)
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