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Samedi 9 Juillet 2011:
Chronique Europe : les priorités très libérales de la Pologne Par Francis Wurtz (1)
Depuis le 1er juillet et jusqu'à la fin de cette année, c'est donc – et pour la première fois – la Pologne qui assure la présidence du Conseil européen. Certes, le traité de Lisbonne a créé une « présidence permanente » actuellement assurée par le Belge Van Rompuy, mais sans supprimer le principe des présidences tournantes. Celles-ci ont, de fait, un poids variable selon leur titulaire. La Hongrie vient d'achever un mandat de six mois sans avoir compté pour grand-chose dans les orientations adoptées. Il n'en ira pas tout à fait de même pour son successeur polonais. Non seulement parce qu'il s'agit du plus important des nouveaux pays membres de l'Union européenne (près de 40 millions d'habitants ; position stratégique entre l'ouest et l'est du continent ; poids de l'histoire de cette nation, etc.), mais aussi en raison du statut privilégié qu'il a acquis aux yeux des forces politiques qui dominent aujourd'hui les institutions européennes, depuis que la droite libérale de Donald Tusk a supplanté la droite nationaliste des frères Kaczynski. Varsovie n'est pas loin de passer pour l'élève modèle de la classe européenne, avec sa croissance économique de 4 % et le zèle libéral de ses nouveaux dirigeants. Nous verrons dans une prochaine chronique quelques-uns des « secrets » de ce développement ainsi que certaines de ses limites. Contentons-nous à présent de mettre l'accent sur les « priorités » affichées de la présidence polonaise de l'UE. Elles sont d'autant mieux accueillies par nombre de ses partenaires qu'elles s'inscrivent de façon volontariste dans la vision qui prévaut tant à Berlin qu'à Paris ou à Londres. Ainsi la Pologne réclame-t-elle « plus de concurrence » et veut-elle « casser les entraves » au commerce transfrontalier là où il en demeurerait encore, notamment dans le domaine des transactions en ligne. Elle entend, dans le même esprit, agir pour davantage de « libéralisation du commerce international », la finalisation du « cycle de Doha » (à l'Organisation mondiale du commerce, OMC), toujours bloqué, l'accession de la Russie à l'OMC, la négociation de plus d'accords de libre-échange avec l'Asie et même d'un accord de libre-échange « approfondi » avec le voisin ukrainien, etc. Les étudiants et les enseignants chercheurs du supérieur apprécieront, en outre, qu'elle demande plus de « coopération des universités avec les milieux économiques » et, plus généralement, une « modernisation des universités » compatible avec la « priorité stratégique » du « renforcement du marché unique » européen. Soyons justes : telle n'est pas la seule « priorité » avancée par les dirigeants polonais pour l'Europe, en 2011. Il s'y ajoute notamment un renforcement de la « défense européenne », en particulier un accroissement des « groupements tactiques » (forces de projection de 1500 soldats chacune) et un « renforcement des relations Union européenne-OTAN ». Pour Henri IV, labourage et pâturage étaient « les deux mamelles de la France ». Pour Donald Tusk, le premier ministre polonais, libéralisme et militarisme sont manifestement les deux pis de l'Europe. (1) Député honoraire du Parlement européen. (source L'Humanité Dimanche)
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