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Dimanche 3 Juillet 2011:
Bien droit pour la gauche Politique. Implanté depuis plus de trente ans en terre havraise, le communiste Daniel Paul reste attaché aux choix engagés, dès sa jeunesse, de changer le monde. Rendez-vous est donné à Saint-Roch. Un de ses endroits havrais préférés. C'est à l'ombre du square du centre-ville, loin de sa 8ème circonscription du Mont-Gaillard où il vit et est élu que Daniel Paul, 68 ans, se livre. Par petites touches. « Daniel est quelqu'un de très humain, mais il ne s'étale jamais sur sa vie privée. Lorsque je travaillais directement avec lui, il fallait aller à l'essentiel, pas de place pour les sentiments », confie Nathalie Nail, son attachée parlementaire entre 1997 et 2004, conseillère générale, dans les mêmes rangs de l'opposition municipale communiste que lui à la mairie du Havre. Sa ville d'adoption depuis 1967 parce qu'elle se trouve à mi distance entre sa Bretagne natale et le ferry que sa femme originaire du pays de Galles prenait alors régulièrement. À deux pas de la statue des amoureux, le politique discret et sérieux évoque le rapprochement de conjoint. Celui-là même qui l'ancre depuis quarante-cinq ans dans une ville dont il ignorait alors les attaches communistes. « J'ai appris que René Cance (maire entre 1965 et 1971) dirigeait Le Havre en achetant L'Humanité. Je ne le savais même pas ! », s'amuse un peu celui qui adhère depuis l'âge de 19 ans au parti des camarades. Un choix logique après une année décevante au PSU. « Le discours gauchiste n'était pas le mien », dit-il simplement. Il rejoint en 1962 le PCF, en plein gaullisme triomphant et des Trente Glorieux où le travail se trouve rapidement. Ce qui n'empêche pas les discussions passionnées avec les copains de promotion de l'École Normale de Saint-Brieuc sur les problèmes sociaux, l'avenir de l'enseignement... Daniel Paul a appris à se frotter aux débats d'idées qu'il affectionne autour de la table familiale. « Parler politique n'était pas un gros mot. J'y ai retenu l'importance de l'engagement et le respect de la chose publique. » En particulier avec son père, marin, souvent absent. Ce dernier voulait que Daniel entre dans ce milieu par la grande porte, par l'école de la marine marchande de Paimpol. Il refuse et rêve de devenir instituteur. Il le sera une partie de sa vie, dont plusieurs années au groupe scolaire de Bléville. Mais, son parcours politique va contrarier ses ambitions de directeur d'école. D'abord en 1977 lorsqu'il rejoint l'équipe du communiste André Duroméa à la mairie du Havre, jeune adjoint en charge de l'enseignement, il choisit de se mettre en disponibilité de l'Éducation nationale. Et rebelote lors des municipales de 83 et 89. Deux souvenirs forts liés à ses mandats locaux : l'explosion de la construction des écoles au temps d'une ville de près de 220 000 habitants et le combat pour ouvrir une université au Havre malgré les réticences de la droite. Face à elle, la figure de la gauche s'est imposée depuis trente ans en cognant contre les capitalistes, ces « financiers qui dirigent le monde ». Le leader local se cogne, lui, deux défaites directes. À trois reprises (en 1995 avec Colliard en tête de liste, 2001 et 2008) Antoine Rufenacht, un adversaire dont il souligne l'imparable sens politique et le sens de l'union, a remporté la mairie. Réputation de gros bosseur Daniel Paul reconnaît que c'est cette unité qui a manqué à la gauche havraise pour se maintenir à la tête de la plus grande ville rouge de France. Conseiller régional et général, il passe au lendemain de l'échec municipal en 95 un coup de fil à l'inspection académique et revient après 18 ans d'absence... à l'école. De nouveaux, la politique réoriente ses souhaits de direction. En 1997, il prend une stature nationale. Le député est devenu incollable sur les dossiers industriels, liés à l'énergie et au fret maritime, se taillant une solide réputation de gros bosseur et d'un fidèle de l'hémicycle. Son histoire personnelle (son fils a été emporté par une myopathie à l'âge de 21 ans, en 1991) le pousse à intervenir dans les réformes liées au handicap. Droit dans ses bottes, fidèle à son idéal de refaire le monde comme au premier jour, celui qui soutient « une gauche qui ose, pas celle de droite qui fait beaucoup de mal » se verrait tout de même bien en grand-père qu'il est, de trois enfants de 14,12 et 10 ans de sa fille de 42 ans, prendre son temps. Et à respirer tranquille au square Saint-Roch... Patricia Lionnet (Havre Dimanche)
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