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Dimanche 12 Juin 2011: Nucléaire Japonais au Havre : rien à déclarer ?
Peur. Les douaniers du Havre refusent de contrôler la radioactivité des conteneurs en provenance du Japon. Un imbroglio sur fond de crainte nucléaire. « Un contrôle par échantillonnage des conteneurs a été mis en place par les agents des douanes sur les ports du Havre et de Marseille ». Avec ce renforcement des contrôles annoncé dans un communiqué du 20 avril, la France suit à la lettre le nouveau règlement adopté par l'Union européenne concernant les importations japonaises de produits manufacturés depuis la catastrophe de la centrale nucléaire de Fukushima. Sauf qu'à ce jour, les douaniers du Havre n'ont contrôlé aucun des 800 conteneurs venant du Japon qui transitent chaque mois sur le port du Havre ! Tout simplement car ceux-ci refusent cette mission de radioprotection qui nécessite, selon eux, des équipes spécialisées de la sécurité civile ou d'entreprises agréées par l'autorité de Sûreté nucléaire. Selon toute évidence, cette annonce a été mal préparée par les autorités, ce que confirme Roland Desbordes, le président de la Criirad (Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité). « Le douanier ne possède pas la compétence minimale pour déceler la contamination. Une fois de plus, nous sommes incapables de gérer une crise nucléaire autrement que par des opérations de communication qui se révèlent contradictoires. S'il existe un risque, il faut des contrôles sérieux. S'il n'y a pas de risque, il faut lever les contrôles. Les leçons de Tchernobyl n'ont toujours pas été tirées... » Les douaniers eux-mêmes soulèvent la contradiction. « Depuis le 20 avril, nous n'avons effectué aucun contrôle, pourtant les conteneurs ont poursuivi leur trajet jusqu'à leur destination finale sur tout le territoire. Le citoyen français qu'on devait rassurer, doit-il s'en inquiéter ? Le commerce prime-t-il sur la sécurité ? », s'interroge Manuela Dona, représentante de la CGT des douaniers. La direction régionale des douanes du Havre affiche son embarras. Mercredi dernier, elle accepte initialement de répondre à nos questions avant de se rétracter quelques heures plus tard. « Nous communiquerons sur ce sujet la semaine prochaine », se borne-elle à dire. Les agents des douanes du Havre ont, depuis le 20 avril, réclamé vêtements et masques de protection, une formation et un protocole qui récapitule la procédure à suivre... « Au départ, nous n'avions que des gants de protection », affirme un agent qui préfère conserver l'anonymat. « La formation de premier niveau (15 heures de théorie, 19 heures de pratique) s'est réduite à une journée avec un officier des sapeurs pompiers. Quant au protocole, il est toujours en cours de rédaction. » Les équipements complets sont arrivés, mais sont toujours sagement pliés dans des placards. Jean-Claude Estienne de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) de Normandie, reconnaît du bout des lèvres que cette absence de contrôle est « regrettable ». Mais, dans le même temps, il minimise les risques affirmant que les autorités japonaises effectuent leurs propres contrôles, que le temps de voyage entre le Japon et le Havre (entre 35 et 40 jours) réduit quasiment à néant les rayonnements... « Le risque est de toute évidence faible, mais il est réel », rétorque Rolland Desbordes. « De plus, la traçabilité des produits japonais est sujette à caution. » La direction des douanes qui se dit prête à communiquer dans les prochains jours, laisse à penser que les premiers contrôles pourraient démarrer rapidement. La première explosion au sein du réacteur de la centrale de Fukushima date du 12 mars. Il y a trois mois, aujourd'hui même... Un véhicule suspect renvoyé à l'expéditeur Si l'administration douanière patauge face à la crise nucléaire, les entreprises de manutention portuaire du Havre, sous la pression de la CGT des dockers, ont diligenté une entreprise agréée en détection de radioactivité afin de contrôler tous les navires en escale transportant des conteneurs en provenance du Japon. « Cette procédure a été mise en place début avril », explique Patrick Sement, délégué à la sécurité au sein du syndicat des dockers. « Les contrôles sont effectués sur des lots de conteneurs quand les navires sont en rade afin d'éviter de prendre du retard pour le débarquement des marchandises. » À ce jour, tous les contrôles des conteneurs se sont révélés négatifs. Néanmoins, il y a une dizaine de jours, sur le terminal roulier du Havre, un van de marque japonaise précédemment refusé par le port de Barcelone, a été reconnu comme contaminé par un taux de radioactivité au-dessus de la normale. « Ce véhicule n'a donc pas été débarqué et il est reparti... », précise Patrick Sement. « La procédure prévoit de renvoyer toute marchandise contaminée à son expéditeur », complète Jean-Claude Estienne de l'ASN. Pour être précis sur ce contrôle, il faut rappeler qu'il concerne des conteneurs fermés. La mission des douanes prévoit un contrôle de 1 à 3 % des marchandises japonaises stockées dans ces mêmes conteneurs. Philippe Lenoir (source Havre Dimanche)
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