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Lundi 7 Juin 2010:

« Être inventif sur les solutions »

Le 47e congrès de la CFDT s'ouvre aujourd'hui à Tours (Indre-et-Loire). Pour Marcel Grignard, secrétaire national, le syndicalisme est à un tournant et organise trop peu de salariés.

« Le syndicalisme à un tournant, oser le changement », écriviez-vous il y a un an dans la perspective du congrès qui s'ouvre aujourd'hui. Pourquoi ce besoin de changer pour la CFDT ?

Marcel Grignard. Pour prendre en compte les défis auxquels le monde du travail et le syndicalisme sont confrontés. L'individualisation des situations de travail répond à une aspiration d'émancipation des salariés, mais s'accompagne d'un cloisonnement du salariat. La question de recoller l'individu et l'intérêt collectif se pose de façon radicalement nouvelle. L'entreprise globale a disparu pour faire place à des entreprises juxtaposées qui s'organisent de manière concurrentielle, y compris au niveau mondial. Il faut donc repenser la question des garanties collectives et des solidarités au sein du salariat. Le syndicalisme sait dire que les dernières années se sont traduites par un accroissement des inégalités. Mais il n'a pas les bonnes pratiques pour corriger la situation. Le syndicat doit être au plus près de la vie au travail et du parcours professionnel des salariés.

Mais la CFDT a déjà beaucoup changé sa vision des choses. Faut-il aller plus loin que le « recentrage » de ces dernières décennies ?

Marcel Grignard. Le « recentrage » était l'affirmation de l'autonomie vis-à-vis du politique et de la pratique de la négociation collective pour donner de nouveaux droits aux salariés. La CFDT a su mettre cette orientation en oeuvre et, dans sa très grande majorité, le syndicalisme français considère que l'autonomie vis-à-vis du politique est indispensable et que la négociation est un outil. Mais le syndicalisme français organise très peu de salariés et est morcelé en une multitude d'organisations. La réforme de la représentativité de 2008 repose sur cette volonté de relever le défi d'une pratique syndicale au plus près des salariés, qui déterminent qui sont les syndicats représentatifs.

Face à la crise, n'y a-t-il pas besoin d'une plus grande combativité des syndicats pour que les salariés ne soient pas les seuls à payer la facture ?

Marcel Grignard. Nous devons être extrêmement exigeants sur l'analyse et inventifs sur les solutions. Le monde qui s'ouvre est inédit, il faut penser les nouvelles régulations et construire des revendications nouvelles. En appui, il faut mobiliser. Je ne dirais pas que la question est de renforcer les luttes, mais d'être davantage porteurs de solutions qui font sens pour les salariés. C'est la base du rapport de forces pour le syndicalisme.

Pour dépasser l'émiettement syndical, vous souhaitez l'émergence d'un « pôle réformiste ». Qu'est-ce que ça signifie ?

Marcel Grignard. Nous ne posons pas comme ça la relation avec les autres organisations syndicales. Nous voulons développer des coopérations. Et nous recherchons une coopération renforcée avec celles qui partagent notre conception du syndicalisme : l'émancipation des personnes dans un cadre solidaire, le réformisme qui vise à construire du progrès social par la négociation et des compromis successifs, la conquête de nouvelles garanties collectives sans recours systématique à l'État, un syndicalisme autonome engagé dans la construction européenne... Certains syndicats partagent cette conception, d'autres non.

Entretien réalisé par Olivier Mayer

(source L'Humanité)

La CFDT attendue sur les retraites

Entre le premier projet de résolution et celui présenté au congrès, les militants ont fait réintégrer la revendication du maintien de l'âge légal de départ à la retraite à 60 ans.

La crise a bouleversé la donne économique et sociale. Elle a aussi fait évoluer les positionnements syndicaux. La CFDT ouvre aujourd'hui son 47e congrès à Tours, en inscrivant sa réflexion dans la « continuité ». Le syndicat reste toujours à la recherche de compromis, mais la priorité donnée à « la réduction des inégalités » fait bouger le curseur sur ce qui est ou non à ses yeux « acceptable ». En 2003, la CFDT avait jugé la réforme Fillon des retraites, basée sur un allongement de la durée de cotisation, « acceptable ». Elle s'affiche aujourd'hui en

« opposition frontale » avec la réforme en cours. « En décalant l'âge de départ, le gouvernement accroît les illégalités vis-à-vis des carrières longues, de la pénibilité et des carrières précaires », a assuré samedi dans un entretien à Ouest France François Chérèque, secrétaire général de la confédération, qui sera réélu vendredi pour un dernier mandat.

La CFDT se sait attendue au tournant sur une question qui lui a fait perdre, après 2003, entre 80 000 et 100 000 adhérents. Et ce d'autant plus que, parmi les « contreparties » négociées en échange de sa signature, certaines n'ont jamais vu le jour. Si le dispositif carrières longues à favorisé le départ en retraite de salariés ayant commencé à travailler jeunes, celui sur la prise en compte de la pénibilité du travail pour obtenir des départs anticipés n'est toujours pas en place.

Dans ce contexte, les militants ont déjà remporté une bataille : rajouter, dans le projet de résolution amendé, une revendication qui ne figurait pas dans le premier texte : le maintien de l'âge légal de départ à la retraite à 60 ans. Trois autres débats, cette fois sur des amendements non intégrés, sont attendus. Plusieurs syndicats proposent de supprimer un paragraphe sur les « conditions » de l'augmentation de la durée de cotisation. D'autres refusent de discuter des « contreparties » qui permettraient « d'unifier les régimes » (privé et public). Enfin, les 1500 délégués vont se pencher sur le financement des retraites, certains proposant de taxer plus franchement les revenus financiers du capital.

Paule Masson

(source L'Humanité)

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