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Dimanche 25 Juillet 2010:

Et ils crièrent : « Pas de syndicats chez moi ! »

Il y a, dans notre pays, un million d'entreprises de 1 à 10 salariés, les TPE, qui font travailler environ 3,4 millions de personnes. C'est là qu'il y a les durées du travail les plus longues, les salaires les plus bas, le plus grand nombre d'heures sup non déclarées, de travail dissimulé, d'accidents et de maladies professionnels, mais aussi les conventions collectives les plus faibles, pas de délégués du personnel, ni de syndicats. Si on prend en compte les entreprises de moins de 20 salariés, on estime qu'elles concernent 5 millions de personnes. Précisons que 97 % des entreprises ont moins de 50 employés et font travailler un salarié sur deux, soit 8 millions. Il n'est prévu juridiquement des délégués du personnel qu'à partir de 11 salariés et des comités d'entreprise qu'à partir de 50. Souvent, et c'est le cas dans le bâtiment, la restauration, la confection, le nettoyage, ou la production audiovisuelle, ces entreprises sont le fruit « d'externalisations » artificielles et elles ne dépendent que d'un seul donneur d'ordres. Il y est quasiment impossible, pour les salariés, de se faire représenter et de s'y défendre. Un seul droit a été créé par la gauche, les « conseillers du salarié », dont la liste est établie sur proposition des organisations syndicales, agréée par le préfet et disponible auprès des mairies ou de l'inspection du travail. Tout employeur qui entreprend de licencier doit avertir le salarié, dans sa lettre de convocation à l'entretien préalable, que celui-ci peut se faire assister par un de ces conseillers. Une intervention qui peut parfois éviter que vous ne vous fassiez jeter comme un chien, par un petit patron excédé . On aimerait que ce droit soit élargi : que les conseillers soient plus nombreux, disposent de crédits d'heures plus importants, qu'un numéro vert affiché dans l'entreprise permette de les joindre et qu'ils aient la possibilité d'intervenir aussi, sur demande des salariés, pour le respect des conventions collectives. Mais imaginer cela est quasiment criminel aux yeux du Medef et de la CGPME. Alors que ces organisations patronales s'étaient engagées à négocier des formes de représentativité et d'expression des syndicats dans les TPE, et que le gouvernement (Woerth, ministre du Travail - encore lui -, en l'occurence) s'était engagé à légiférer dans ce sens, elles ont fait un lobbying auprès de l'UMP pour faire repousser la loi au Sénat puis à l'Assemblée en plein été.

« Pas de syndicats chez moi ! » affichaient les petits patrons récemment devant Sarkozy lui-même, qui ne pipa mot. « Dialogue social dans les TPE ? une fausse bonne idée ! » s'écrie Mme Parisot. Trahison de la parole donnée, rien de surprenant chez ces gens-là, mais raisons de plus pour ne pas les laisser faire.

 (source l'Humanité Dimanche)

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