> Presse —> L'enfer des fins de droits |
Vendredi 26 Février 2010:
Son ami trouve du boulot, elle perd le RSA Directeur Pôle Emploi Cauchoise à Rouen « Si le conjoint touche un peu plus que le Smic, vous n'avez certes plus droit à l'ASS ou au RSA. Mais un parcours de formation, diplômant ou non, peut vous permettre d'être rémunéré, par Pôle Emploi ou la Région. » Quelles indemnités de chômage ? Si vous avez travaillé 6 mois, vous avez droit à 6 mois d'allocation chômage, basés sur 57,4 % de votre revenu but mensuel. Dans tous les cas, l'indemnité ne peut dépasser 2 ans, sur les mêmes bases (3 ans pour les + de 50 ans). Au bout de 2 ans, l'allocation de solidarité active ou le RSA prennent le relais, selon votre période travaillée antérieure. Si l'on se réfère aux statistiques de Pôle Emploi, un million de demandeurs d'emploi devraient arriver au terme de leur indemnisation en 2010, dont 400 000 sans revenu de remplacement. C'est le cas de Cékia Lagrue, 31 ans, rencontrée à l'agence cauchoise de Pôle Emploi à Rouen, qui ne peut même pas compter sur sa famille. « Elle est à Bordeaux. Et Arnaud mon ami, ne voit plus la sienne. Alors on ne peut compter que sur nous : et nous avons une petite fille, Manon, qui a 9 ans... On vit actuellement avec 650 € de RSA par mois, un loyer de 485 € dont 250 € pris en charge par l'allocation logement. Donc, ça ne suffit pas pour vivre. Alors la semaine dernière, pour la première fois, je suis allée aux Restos du Cœur, à Darnétal. J'ai pris une grande respiration et mon courage à deux mains. » « Sans droits, le moral ne va pas tenir » La jeune femme vient de terminer une mission de deux mois chez un libraire, à 700 € nets par mois. « Pas suffisant pour toucher du chômage car je n'ai pas accumulé assez de temps de cotisation. Je suis donc au RSA. Le paradoxe, c'est qu'Arnaud vient de trouver un travail en CGI, après avoir envoyé plusieurs centaines de CV. Il a 25 ans, un BTS action commerciale en poche. Et là, il est à l'essai pendant trois mois. Mais du coup, la CAF nous a déjà prévenus qu'on allait perdre le RSA. Parce qu'il va gagner 1450 € brut, sur 39 heures. S'il n'avait travaillé que 25 ou 28 heures, on aurait eu un complément. » En perdant le RSA, Célia sait que l'allocation logement peut baisser, et qu'elle devra s'acquitter de la redevance télé jusque-là écartée. Alors la jeune femme met les bouchées doubles pour trouver du travail. « Je bosse depuis l'âge de 16 ans, j'ai fait un apprentissage dans la coiffure ; j'ai beaucoup travaillé en librairie, mais j'aimerai m'orienter vers l'immobilier. Je sais m'adapter, écouter, apprendre. Je sais me débrouiller. Mais c'est vrai que parfois, je suis découragée. Et je n'ai pas envie que Manon souffre. Confronté à la situation de la jeune femme, Florent Gouhier, le directeur de l'agence, lui demande quel conseiller Pôle Emploi la suit. « Je n'en ai pas ; je me débrouille. J'ai l'habitude... » « Erreur, souffle le directeur, il faut toujours se faire accompagner. » Et de convaincre notamment de suivre une semaine d'immersion en entreprise, aide financière à l'appui. Ne serait-ce que pour savoir si l'immobilier lui convient. « Le problème est de pouvoir vivre décemment, et c'est forcément urgent », rétorque Célia. Un peu plus loin, Chiheb Dakhli, 30 ans, entre son CV dans des ordinateurs. « Moi, j'ai encore deux mois d'allocations de chômage. Mais ensuite, plus rien. Parce que la femme travaille au CHU ; elle fait partie du personnel administratif, alors je n'aurai pas droit au RSA. Sauf qu'avec ses 1 000 € nets, on ne va pas bien loin. Et moi je cherche du boulot depuis un an et demi, dans la vente notamment. Elle vivait à Rouen, et moi je viens de la région parisienne. On s'est mariés. » Quand il ne trouve rien sur Rouen, Chiheb Dakhli file à Paris. « On a aussi vécu chez mes beaux-parents pendant six mois, ce n'est pas facile pour un jeune couple. J'espère trouver du boulot, parce que sans droits, le moral ne va pas tenir longtemps. » Marc Braun (source le havre libre)
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