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Mercredi 15 Septembre 2010:

 

Éditorial

Retraites, salaires, profits

Par Michel Guilloux

Dans cette France de 2010, cinquième puissance économique mondiale, il y a les gens sérieux et il y a les autres. Parmi les premiers, l'on peut ranger les éditorialistes du très patronal quotidien les Échos qui, hier encore, parle des syndicats comme certains adultes

« responsables » à un enfant de cinq ans. Voyez-vous, ces « syndicats font la fine bouche » devant les mirifiques concessions lâchées, tels des bonbons à des gamins capricieux, par le pouvoir sur sa contre-réforme des retraites. Dans le même camp se range le Figaro qui déclame, lui, l'antienne de la terrible menace que constituerait une augmentation des prélèvements sur les entreprises, au risque de délocalisations et donc de réactions en chaîne sur l'emploi. Monté en ligne, pour figurer au premier rang de tous, François Fillon, servi par le service public d'information, jeudi dernier encore, ou qui, ce week-end, martèle l'argument de la fatalité internationale puisque « tous les pays ont pris acte du vieillissement ».

 

Et donc, il y a les gens qui ne sont pas sérieux aux yeux de ce beau monde, du pouvoir et de l'argent. Ils n'ont pas envie de passer leur vie à la perdre ? Quelle folie ! Et voilà ces syndicats qui offrent le front uni dont ont besoin les salariés pour les défendre face à la régression en cours. Ceux qui organisent cette dernière, forts de leur domination sans partage, mais non sans quelques fissures, n'ont donc que trois arguments, répétés à satiété, et repris en boucle, sans recul ni débat contradictoire. Mais comme les idées dominantes dans une société sont toujours celles de la classe dominante, comme le disait Marx en son temps, qui ressemble furieusement au projet de société porté par cette droite et cette bourgeoisie qui n'ont jamais digéré le Front populaire et toutes les avancées sociales conquises de haute lutte depuis, les arguments « d'évidence » peuvent être une arme efficace, lorsqu'ils s'appuient sur le sentiment de fatalité.

 

Plutôt donc de redevenir « sérieux » ou, c'est la même chose, d'aller répétant « grève générale, grève générale » comme les cabris européens du Général naguère, l'intersyndicale a décidé de porter le fer à la fois dans les entreprises et auprès des députés qui s'apprêtent à voter, demain en première lecture, le projet Woerth-Sarkozy. Dans l'épreuve de force désormais engagée, l'après-7 septembre est aussi porté dans l'opinion comme l'indique le sondage que l'Humanité publie aujourd'hui, par un soutien et un espoir de plus en plus fort de voir les syndicats poursuivre leurs appels à la mobilisation. Comme l'indique leur lettre ouverte au chef de l'État, le profond sentiment d'injustice nourri contre son projet est celui sur lequel s'arc-boutent cette droite et ce patronat arrogants : les bornes portées à 62 et 67 ans. Alors que l'âge moyen de sortie du marché du travail est de 58 ans. Alors que, retournant les effets de la crise contre ses victimes, les grands groupes et entreprises précarisent l'emploi comme jamais. Ils n'investissent pas, se gavent de dividendes, dilapident fruits du travail et aides publiques. Les seniors, les femmes et les jeunes sont les premiers visés de ces choix, comme de ce projet de loi, qui placent un pays comme la France en matière de taux d'emploi sous la moyenne des 27 pays de l'Union européenne. C'est dire combien les salariés ont besoin d'ancrer leur combat dans leurs entreprises pour contester ces choix, comme pour se donner encore plus de force d'ici au 23 septembre.

(source l'Humanité)

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