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Mardi 23 Mars 2010:

 

La confrontation sur les retraites aura bien lieu

Alors que les Français lui demandaient de revenir sur cet aspect de sa politique, Fronçois Fillon confirme le cap d'une réforme qui ferait sauter la retraite à soixante ans.

En déclarant dimanche vouloir « garder le cap fixé par les élections nationales ». François Fillon a annoncé la couleur : l'exécutif n'entend pas revenir sur ses intentions en matière de réforme des retraites. Balayée, la dimension nationale du message délivré par les électieurs lors des régionales. La retraite sera donc bien l'objet de la grande confrontation sociale de 2010. L'agenda officiel est fixé. Mi-avril, le conseil d'orientation des retraites (COR) publiera ses projections financières pour le régime général du secteur privé, donnant ainsi le signal des concertations. Et « début septembre », le gouvernement disposera « un texte » devant le Parlement. Soit un délai très court pour un débat sur un enjeu social et sociétal de première importance. À moins que les mobilisations sociales et politiques viennent bousculer le jeu d'ici là.

   Les ambitions sarkozystes sont claires elles aussi. Sous prétexte de répondre au défi du vieillissement, il s'agit de comprimer la dépense retraite, d'une part en poursuivant sur la voie, ouverte en 1993 et 2003, de l'allongement de la durée de cotisation requise pour une pension complète (quarante et un ans actuellement), d'autre part en faisant sauter le « verrou », selon le vocable du Medef, du droit au départ à soixante ans. Deux mesures qui contrairement à ce qui est affirmé en haut lieu, auraient pour effet de baisser le niveau des pensions et, du même coup, de diminuer la confiance, déjà bien entamée, dans le système par répartition, et donc de favoriser la capitalisation. Le quotidien le Figaro caractérisait hier ce chantier comme « un des préalables au redressement des finances publiques ». En clair, un moyen de faire payer au système de retraite, aux assurés sociaux, la facture de la crise, qui a vertigineusement creusé le déficit de la Sécu.

La réforme des retraites s'inscrit ainsi dans le contexte de la violente offensive annoncée pour le mois d'avril contre les dépenses publiques et sociales. Mis en place à la suite de la « conférence sur le déficit » réunie en janvier, des groupes de travail planchent actuellement sur diverses mesures permettant de rendre plus contraignants des « objectifs de dépenses », fixés aussi bien pour l'assurance maladie que pour les collectivités locales. Parmi les dispositifs à l'étude : une série de crédits de l'assurance maladie, décrétés « de moindres priorité » (fonds pour la modernisation des hôpitaux, pour la coordination des soins, etc.) seraient automatiquement gelés en début d'année, et libérés seulement « lorsque les autorités disposeraient d'une assurance suffisante que l'objectif de dépenses serait respecté ».

Tout en faisant préparer cette camisole de force budgétaire, le chef de l'État a relancé, côté recettes, l'idée d'une réforme du financement de la Sécu par la mise en place d'une « TVA sociale », « une expression incompréhensible et inadaptée », mais, un « sujet pourtant bien à l'ordre du jour », indiquait-il le 12 mars dernier. Rappelons qu'il s'agit d'abaisser les cotisations sociales et d'augmenter la TVA sur la consommation. Pas pour déplaire, bien sûr, à un patronat dont l'un des dirigeants, Frédéric Saint-Geours, de l'UIMM (métallurgie), exprimait ainsi, hier dans les Échos, la priorité : « Il faut régler en urgence la question de la compétitivité par la réforme de la protection sociale. » Si l'on ajoute à cela un projet de couverture du « risque dépendance » reposant en partie sur les assurances privées, on voit qu'il y a bien urgence, pour les syndicats et la gauche, à se mobiliser et affûter leurs propositions alternatives, pour éviter que la Sécu de tous soit sacrifiée sur l'autel des profits de quelques-uns.

Yves Housson

(source l'Humanité)

 

 

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