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Lundi 6 Septembre 2010:

Entretien

Alain Bocquet : « ce gouvernement n'est pas à l'offensive, il est sur le recul »

Pour Alain Bocquet, député maire communiste de Saint-Amand-les-Eaux, dans le Nord, le 7 septembre est le début d'une bataille de longue haleine pour faire céder un « gouvernement qui est sur le recul ». Le débat au Parlement doit être un moment fort de la mobilisation populaire pour ce combat que le député qualifie à la fois

« d'historique », « de société » et « de civilisation », afin de donner un coup d'arrêt à une conception de la société fondée sur la dictature de l'argent.

HD. Depuis plusieurs jours, vous multipliez les initiatives et les débats pour faire signer une pétition contre le projet du gouvernemental, quel est l'accueil des gens ?

Alain Bocquet. Cette rentrée est marquée par une accumulation de contestations très fortes qui se catalyse sur la question du droit à la retraite à 60 ans. Il y a un ras-le-bol généralisé. Les gens vivent dans l'angoisse du lendemain, pour eux, leur famille, leurs enfants. Cette politique est devenue insupportable dans leur vie quotidienne. Nous sommes sortis d'une phase de résignation que le pouvoir a tenté de cultiver avec l'alibi de la crise sur le thème « Tous dans le même bateau ». C'est un début, mais il se passe quelque chose. J'ai le sentiment que, malgré les diversions pour faire oublier le scandale Bettencourt et les retraites, le 7 septembre va être très fort. C'est le début d'un combat, d'un bras de fer qui s'engage entre le peuple et le gouvernement, dont le projet a été écrit à l'encre du MEDEF. Le gouvernement peut reculer. Il vient de le faire sur l'APL et la demi-part fiscale. Il faut mesurer que ce gouvernement n'est pas à l'offensive, il est sur le recul.

 

HD. Que peut-on espérer du débat qui s'engage au Parlement ?

A.B. Le débat parlementaire est évidemment décidé par l'exécutif mais il peut être un moment fort. Pour cela, il faut qu'il y ait une vraie connivence entre les forces populaires en mouvement et l'action des parlementaires, notamment communiste, pour contrer ce projet qui est d'une brutalité sans nom. Ce projet est le troisième étage d'une fusée missile contre notre système historique de retraite par répartition. Le premier étage était la loi Balladur de 1993, le deuxième la loi Fillon de 2003. Ces réformes ont déjà fait baisser le pouvoir d'achat des retraités de 25 % depuis 1993. Si le projet était adopté, 70 % des retraites seraient financés par les salariés, il se traduirait également par un million d'emplois de moins pour les jeunes en 2016.

HD. Pourquoi cet acharnement du gouvernement contre la retraite à 60 ans ?

A.B. Tout cela est réfléchi pour aboutir à ce que souhaite le MEDEF et que l'on retrouve noir sur blanc dans le livre vert de la Commission européenne publié le 7 juillet dernier : la fin de la retraite par répartition au profit de la capitalisation à l'horizon de 2018. C'est le fond de la démarche. C'est pour cela que la retraite à 60 ans dans le cadre d'un système par répartition est un marqueur progressiste, c'est un acquis historique. C'est donc un combat historique, un combat de société, un combat de civilisation qui est engagé.

HD. Pourtant, le gouvernement explique que sa réforme doit sauver la répartition ?

A.B. Le mensonge d'État est une pratique qui est devenue presque naturelle avec le sarkozysme. Il essaie de faire prendre des vessies pour des lanternes pour masquer le fait que leur projet scélérat est une régression de civilisation. Ils veulent une société du tout-marché, où tout s'achète et se vend, où l'on peut gagner de l'argent sur tout. L'exception française fait que des espaces comme la retraite avec la répartition ou la santé avec la Sécurité sociale échappent encore partiellement à cette logique. Il y a là une manne financière sur laquelle les grands groupes veulent faire main basse. Or ce gouvernement et le président de la République ne sont rien d'autre que des agents du CAC 40, de ces grands groupes qui, je le rappelle au passage, ne paient que 8 % d'impôts à la France quand les PME,TPE, PMI en payent près de 30 %

Je le répète, le 7 septembre est un début, il faut se préparer à une bataille de longue haleine. Pour l'instant, l'urgence est d'élargir le réseau de la mobilisation contre ce projet et pour un projet progressiste alternatif. Est-ce que la dictature de l'argent marque un nouveau point ou subit-elle un coup d'arrêt ?

Entretien réalisé par St.S.

(source L'Humanité Dimanche)

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