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Projet de loi Hôpital - Patients – Santé - Territoires

Daniel PAUL, député de Seine Maritime

Intervention sur l’article 3

Garantir le droit à la santé pour tous, comme un droit fondamental, est un véritable enjeu de société qui place l’humain au cœur des enjeux économiques et sociaux.

Notre système de santé reste sans doute un des meilleurs au monde,  avec son maillage territorial de service public et sa protection sociale solidaire, mais la comparaison tient à la dégradation des systèmes des pays voisins.

Même si les résistances ont ralenti leurs effets, les politiques libérales successives ont dégradé la situation ; elles ont provoqué l'explosion des déficits des hôpitaux, la pénurie de professionnels qualifiés et des milliers de suppressions d’emplois, les déremboursements, les franchises médicales, les dépassements d’honoraires, les fermetures de services de proximité, etc..creusant les inégalités territoriales et dégradant l'accès à des soins de qualité pour tous. Aujourd’hui, vous pensez le moment venu de porter un nouveau coup au système né à la Libération.

Nous ne sommes pas pour l’immobilisme. Notre système de santé doit évoluer, mais en restant fidèle à des principes forts de solidarité, d'égalité, d’accès aux soins, selon le beau principe de la Sécurité Sociale « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. »

Les orientations proposées dans votre projet de loi ne vont pas dans ce sens. Le cadre budgétaire est clair : retour à l’équilibre pour la Sécurité sociale en 2012. C’est dire que sans recettes nouvelles pour la sécu, les restrictions à marche forcée vont continuer. Et que l'on ne s'y trompe pas! Votre but n’est pas de réduire les dépenses de santé, mais d’en finir avec le système solidaire. Chacun sait que les dépenses de santé vont augmenter ; il s'agit donc pour vous de permettre au privé de se développer sur ce  marché en croissance continue, avec une clientèle captive de gens qui seraient prêts à beaucoup sacrifier pour se soigner.

Dès lors, de nouvelles répartitions sont à l’ordre du jour : entre le système public cantonné dans ce qui coûte cher et le privé qui aspire à prendre tout ce qui rapporte, mais aussi entre une sécurité sociale dont il faut réduire les dépenses (et même les recettes !) et un dispositif assuranciel privé prêt à prendre toute sa part dans cette nouvelle donne.

Pourtant la crise financière montre l’importance de la protection sociale pour aider l’immense majorité de la population à faire face et pas seulement les plus démunis.

Mieux couvrir les besoins est aujourd’hui une nécessité et cela passe, en priorité, par un système de santé fondé sur la solidarité et la proximité et non ouvert la rentabilité financière.

La situation du Groupe Hospitalier Havrais illustre le malaise qui touche notre système de santé. La Région Havraise connaît de lourdes pathologies et une  forte surmortalité ; et alors que l’hôpital du Havre fait face à de grandes difficultés, comme d’ailleurs la plupart des hôpitaux en France, (déficit cumulé des exercices 2006, 2007 et 2008 de 52 millions, dont 19 millions en 2008, exercice pour lequel la part de T2A atteint les 2/3 de la masse globale budgétaire contre la moitié durant les 2 premiers), on voit se développer une hospitalisation privée, portée par la « Générale de santé ». Dans le même temps, la ville du Havre voit s’accentuer une pénurie de médecins libéraux, qu’il s’agisse de généralistes ou de spécialistes.

Alors, force est de constater que le fameux adage, si cher au Président de la République « travailler plus, pour gagner plus » est difficilement applicable  aux hôpitaux, « soigner plus pour gagner plus ». Difficile lorsqu’il manque près de 30 médecins toutes disciplines confondues au sein du GHH, que le manque de personnel oblige à fermer des lits alors que parallèlement le secteur privé ne cesse de grignoter « des parts de marché », aidé en cela par des investissements d’infrastructures financés bien souvent en grande partie par de l’argent public.

Madame la Ministre, vous avez dit votre accord pour aider cet hôpital à condition qu’il engage un certain nombre de réformes.

La majorité du CA vous a entendue ; les mesures retenues visent notamment à diminuer la durée moyenne de séjour jugée trop longue : constatons quand même que les solutions d’accueil en soins de suite sont largement insuffisantes.

L’autre mesure, qui n’est pas la moindre, consiste à supprimer 387 emplois d’ici 2012. Et cela touchera tous les secteurs.

Une telle politique met en péril l’offre de soins dans une région déjà particulièrement sinistrée. Mais comme le rapportait la presse locale, citant un responsable hospitalier, « on ne peut dissocier moyens et organisation, l’enjeu étant de retrouver une capacité d’autofinancement ».

En octobre dernier, le magazine professionnel Impact Médecine a classé le Havre à la 36ème place des grandes villes pour l’offre de soins, soit en dernière position. Parmi les indicateurs figurent le taux de mortalité, l’espérance de vie, le pourcentage de 65 ans et plus, le taux d’incidence des cancers, les comportements à risque, les taux d’équipements en lits et places en établissements, le matériel d’imagerie médicale, la démographie médicale, ainsi que des facteurs environnementaux tels le climat, la pollution et les sites industriels à risque.

Les orientations de votre texte de loi ne vont pas améliorer la situation, au Havre ou ailleurs, au contraire !

 


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